Eric Delamotte a ensuite ouvert le cycle de conférences et de tables rondes sur la question : "La culture de l'information a-t-elle une histoire?" Afin d'apporter des éléments de réponse à ces interrogations, il a dégagé huit "remarques" qui sont autant de pistes de réflexions et d'orientation pour la recherche. En particulier, au-delà de l'intérêt grandissant de pour ? l'approche historique dans la construction d'une épistémologie de la documentation, il s'est employé à re-questionner la "périodisation" de la documentation (âge du livre, de la presse, de la paperasse et des fichiers) ainsi que son intégration dans un corpus plus vaste et dans un temps plus long, moins sujets aux effets de mode (Digital natives, blog, Facebook...). Par ailleurs, il a cherché à confronter la documentation et la culture de l'écrit au "techno-pouvoir" politique (Stiegler) et au contexte de la mondialisation.

Lors de la deuxième conférence, Jean-Michel Salaün a, quant à lui, plaidé "Pour des architectes de l'information". En rappelant que la structuration du monde documentaire se fait en parallèle de l'évolution du monde et des valeurs, il a montré le passage d'une construction du savoir à partir "des observations de la nature" à des savoirs construits à partir des ressources. Cette redocumentarisation du monde, dans le contexte d'une organisation documentaire industrielle, rappelle les trois dimensions du document déjà proposées par le collectif R.T.P. Doc, à savoir la forme (le Vu), le texte (les contenus, le Lu) et les échanges (les médias, le Su). Dans un cadre économique concurrentiel, ces trois dimensions sont incarnées par les stratégies commerciales de "Apple", "Google" et "Facebook". Il résulte de cette situation un besoin "d'architectes de l'information" qui œuvrent sur la construction de ces nouveaux espaces d'information, qui organisent et cataloguent le Web et qui forment une communauté de pratiques.

Cette première journée a pris fin avec une table ronde animée par Eric Bruillard sur le thème de "L’organisation des connaissances dans le contexte du web". Olivier Ertzscheid, Evelyne Broudoux et Dominique Cardon ont développé des argumentations techniques et sociologiques complémentaires autour de la mutation du document (Broudoux), de la revendication insidieuse de neutralité par le Web et ses "jardins fermés" incarnés par les nouvelles technologies de l'attention et de la distraction (Ertzscheid). Du passage, enfin, d'un ordre algorithmique des résultats de recherche, comme le PageRank de Google, à une recommandation affinitaire, tel que le "EdgeRank" de Facebook (Cardon).