Référence documentographique

Pernaton-Defay Flore. L’évaluation diagnostique en seconde : un support pour l’enseignement de l’information-documentation. Les Trois couronnes, juin 2012.

http://lestroiscouronnes.esmeree.fr/chantiers/l-evaluation-diagnostique-en-seconde-un-support-pour-l-enseignement-de-l-information-documentation

L’évaluation diagnostique en seconde : un support pour l’enseignement de l’information-documentation

CDI du lycée Lamartine, de Mâcon (académie de Dijon)

Toute didactique considère qu’il faut commencer par prendre en compte les représentations et les acquis des élèves avant que de penser à construire le cours. L’évaluation diagnostique représente ainsi pour l’enseignant un outil pertinent pour déterminer le profil de ses classes. A partir des résultats obtenus, il pourra donner une plus grande cohérence à ses progressions et sera en mesure d'orienter le contenu de ses séquences dans le sens des besoins constatés des élèves. Ces tests diagnostiques peuvent être placés au début de chaque niveau afin de se projeter dans l’année, mais on remarque que, en information-documentation principalement, ils prennent plutôt place au début du collège ou à l’entrée du lycée.

C’est ce dernier cas qu’illustre aujourd’hui Flore Pernaton-Defay, professeure documentaliste au lycée Lamartine de Mâcon (académie de Dijon), en nous présentant le travail accompli cette année auprès de quelques 294 élèves de 2nde. Les matériaux qu’elle nous livre sont précieux : questionnaire, méthodologie, identification des notions mobilisées. Mais outre le fait qu’ils peuvent nous inciter à faire de même et nous accompagner dans cette entreprise, ils offrent, à partir des résultats obtenus, un aperçu tangible des réussites et des difficultés des élèves de ce niveau en matière de maîtrise des savoirs scolaires de l’information-documentation. Flore Pernaton-Defay nous donne ainsi à voir dans sa totalité, ce qui est rare, en quoi consiste le projet diagnostique, de l’élaboration de l’outil au bilan qui en constitue le but et l'intérêt (LTC).


Pour ma troisième rentrée dans le lycée où je suis affectée, j’ai souhaité proposer une évaluation diagnostique aux classes de seconde avant de mettre en place un enseignement approprié de l’information-documentation basé sur les besoins des élèves.

1- Objectifs de l’évaluation diagnostique

Après avoir passé 8 ans au collège Saint-Exupéry de Mâcon - classé ZEP- , j’ai été nommée à la rentrée 2009 au lycée Lamartine, un lycée d’enseignement général et technologique de près de 1400 élèves . Mes deux premières années, interrompues par un congé maternité, m’ont permis d’observer les pratiques des élèves dans ce CDI et de mesurer la place dévolue jusque-là au professeur-documentaliste dans l’établissement. J’ai ainsi pu faire les constats suivants :

  • une occupation importante du CDI - en nombre d’heures - par des enseignants avec des classes (ECJS et TPE surtout) mais peu de réelle collaboration pédagogique avec le professeur-documentaliste dont le rôle se réduit souvent à rechercher les documents non trouvés par les élèves ou à résoudre les problèmes techniques ;
  • un manque d’expertise en pédagogie documentaire pour accompagner les élèves dans une démarche rigoureuse qui respecte les étapes de la recherche d’information, pour permettre de travailler les savoirs info-documentaires et pour donner aux élèves les moyens de transformer une information en connaissance,
  • la quasi-absence de formation des élèves à l’information-documentation : la « visite » des classes de seconde se résumait à mon arrivée à une présentation – passive pour les élèves - des différentes ressources et du règlement du CDI, sans trace écrite. J’ai vite constaté que les élèves étaient peu attentifs lors de cette présentation.

Cette année, j’ai donc souhaité pouvoir évaluer les connaissances info-documentaires des élèves de seconde à leur entrée au lycée, afin de partir de leurs besoins pour proposer un plan de formation à l’information-documentation, formation que les élèves pourraient réinvestir l’année suivante pour les TPE.

L’objectif plus général est de permettre à l’élève - grâce à cette formation - d’acquérir une autonomie en recherche documentaire, ce qui inclut l’utilisation de différents outils de recherche et l’exercice de l’esprit critique.

2- Les conditions de l’évaluation

Près de 300 élèves évalués

Nous avons proposé cette évaluation-diagnostique à 9 classes et demie de seconde sur les 13 que compte le lycée, soit 294 élèves de seconde sur les 410 que compte ce niveau (72%). Les classes ont été choisies en fonction des partenariats noués avec les enseignants et des disponibilités d’emploi du temps.

La séance, de 55 minutes en tout, se déroulait au CDI, en demi-classe (15 élèves environ) ou en groupe d’aide personnalisée (entre 15 et 22 élèves), sauf pour une classe venue sur le créneau de l’étude. Les créneaux utilisés ont été les suivants :

  • ECJS : 2 classes
  • Français : 2 classes
  • Aide personnalisée : 5 classes
  • Etude : une classe euro (36 élèves)

Pour la mise en œuvre et la correction de ce questionnaire, j’ai travaillé avec Elisabeth Alpert, une documentaliste contractuelle. Une ou deux professeurs-documentalistes ont ainsi pu encadrer les élèves.

Les connaissances évaluées

Le questionnaire que j’ai élaboré teste 10 notions choisies parmi celles supposées acquises au collège :

  • Classement des documents
  • Cote
  • Droit de l’image
  • Éléments bibliographiques
  • Livre de fiction
  • Livre documentaire
  • Moteur de recherche
  • Périodicité
  • Recherche sur catalogue
  • Références bibliographiques

Le champ exploré peut paraître restreint. Cependant, chacune de ces notions ne peut être repérée de manière isolée, en indépendance totale avec d’autres notions sur lesquelles elle s’appuie ou bien se distingue. L’élaboration du questionnaire a ainsi mis en évidence un réseau conceptuel beaucoup plus large, formant une sorte d’arrière-plan aux notions mises en vedette par les questions (voir l’annexe 2) :

Réseau de notions info-documentaires

Certaines questions nécessitent une réponse rédigée afin de se faire une idée des représentations des élèves. Il a également été élaboré en tenant compte des compétences demandées pour le B2i collège dans sa version d’avant décembre 2011.

En raison du temps imparti et du nombre insuffisant de postes informatiques dont nous disposions, il n’a pas été possible d’évaluer la démarche mise en œuvre par les élèves lors d’une recherche sur Internet (comment procèdent-ils pour rechercher l’information , comment sélectionnent-ils les sites parmi le nombre important de résultats ? utilisent-ils la recherche avancée ? vont-ils sur des banques de données spécialisées, etc.), ni plus généralement sur la démarche mise en œuvre dans la recherche (choix des mots-clés, des outils de recherche, sélection des documents, exploitation des informations, etc.). Ce point sera à développer dès la rentrée prochaine.

Quelques explications à propos du questionnaire

Il est demandé aux élèves de préciser de quel collège ils viennent.

Le questionnaire se compose de 9 questions numérotées, mais 27 réponses sont en réalité attendues puisque certaines questions se déclinent en sous-questions. Par exemple :

  • Question 1 : Explique ce qu’est un livre de fiction et un livre documentaire et comment ils sont classés au CDI : 4 réponses attendues.

Pour la question 5, les périodiques sont disposés sur les tables, l’objectif étant de voir si les élèves savent rédiger une référence bibliographique d’article de périodique, et non pas de vérifier s’ils sont capables de le retrouver dans le CDI.

Pour la question 7, qui portait sur BCDI, sept postes informatiques sont à la disposition des élèves. Pour éviter que tous les élèves se retrouvent au même endroit au même moment, quatre déclinaisons du questionnaire sont proposés, avec les mêmes questions mais présentées dans des ordres différents. Pour une même question, les livres à chercher, les articles de périodiques à retrouver, les recherches sur BCDI sont différents. C’est le cas des questions 3, 4, 5 et 7, notamment la 3A où chaque élève n’a à répondre qu’à l’intitulé dont le numéro est entouré parmi les 7 ou 8 proposés.

Quelques consignes

  • Les réponses doivent nécessairement être individuelles.
  • Dans le cas où un élève ne répond pas à une question, il lui est demandé de préciser si c’est à cause d’un manque de connaissance ou d’un manque de temps.
  • En fin de questionnaire doivent être précisés les points qui ont posé problème.

Le déroulement de la séance

Les cinq premières minutes ont été consacrées à la présentation des professeurs documentalistes, du cadre et des objectifs de la séance :

  • évaluation non notée
  • évaluation destinée à bâtir le programme de formation que nous allions mettre en place pour les préparer aux TPE qu’ils auront à présenter l’an prochain,
  • évaluation nécessaire puisqu’ils viennent de différents collèges voire lycées
  • évaluation liée à certaines compétences du B2i
  • nécessité pour eux de répondre individuellement

Nous avons malheureusement noté que certains élèves ont fait le questionnaire ensemble (réponses fausses identiques facilement identifiables) et que tous n’ont pas précisé la raison pour laquelle certaines questions n’avaient pas été traitées.

Cinq minutes étaient ensuite laissées aux élèves pour qu’ils découvrent le CDI et l’organisation des ressources, puis les 45 minutes restantes étaient consacrées à répondre aux questions.

En annexe sont mis à disposition les documents relatifs à cette évaluation :

  • Annexe 1 : Le questionnaire
  • Annexe 2 : Les savoirs et notions info-documentaires évalués
  • Annexe 3 : Les besoins en formation par questions et résultats de l’évaluation par classe
  • Annexe 4 : Un exemple de questionnaire corrigé anonymé

3- Premiers constats

Les corrections ont été effectuées à partir d’une grille commune à tous les groupes, mais nous avons choisi d’analyser plus finement les réponses de quatre classes pour porter une attention particulière aux formulations données par les élèves et pour relever notamment des imprécisions syntaxiques ou des erreurs. Le tableau « Besoins en formation » (cf. annexe 3) synthétise par question et par classe les besoins en formation des élèves interrogés.

La colonne « Total » de ce tableau permet de dégager la tendance et de faire apparaître les points suivants :

  • les notions info-documentaires sont peu maîtrisées ;
  • les plus forts pourcentages de besoins en formation se trouvent dans les questions :
    • n°1 : définition et classement de livres de fiction et livres documentaires,
    • n°2 : références indispensables pour retrouver un livre, un article de périodique et une page internet,
    • n°7 : utilisation de BCDI,

puisqu’elles totalisent au moins 80% d’élèves à former sur l’ensemble des classes testées.

Enfin, nous avons noté une différence de résultats entre les élèves de la classe Euro et les autres classes, les premiers ayant dans l’ensemble mieux réussi la plupart des questions. N.B. : Les résultats de l’évaluation ont été communiqués aux élèves par l’intermédiaire des professeurs principaux.

4- Les résultats de l’évaluation

De manière générale, tout au long de ce questionnaire, nous avons pu constater un problème d’expression écrite avec beaucoup d’imprécisions, notamment :

  • les mots « nom » et « chose » sont fréquemment employés,
  • une méconnaissance ou une approximation de notions telles que « fiction », « cote », « périodique », « auteur », « thème », « référence », « édition », utilisées les unes à la place des autres ;
  • confusion entre CDI et BCDI,
  • confusion entre moteur de recherche, système d’exploitation et navigateur internet
  • confusion entre site et page internet.

S’agissant à présent des questions, nous dressons ci-dessous un bilan détaillé.

Question 1 : « genre et classement »

"Explique ce qu’est un livre de fiction et un livre documentaire et comment ils sont classés au CDI."

  • plus de 80% des élèves ne savent pas expliquer comment sont classés les livres du CDI ;
  • la notion de cote est très peu citée ;
  • la notion de classification n’est mentionnée que par un seul élève : est-ce un hasard ? C’est un élève de la classe euro que j’ai eu en 6è au collège Saint-Exupéry qui a travaillé sur cette notion en 6è ;
  • peu d’élèves savent ce qu’est une classe ;
  • par contre, ils savent à peu près retrouver un document quand on leur donne une cote (questions 3 et 4).

Ces notions de cote et classe sont pourtant abordées dès la 6è par la majorité des professeurs-documentalistes et pourraient être réinvestis chaque année de la scolarité au collège si chaque élève avait l’opportunité de réaliser au moins un travail annuel de recherche d’informations aboutissant à une production.

Livres de fiction

Définition du livre de fiction

Exemples de définitions approximatives ou erronées proposées pour la définition du livre de fiction :

  • « c’est un fait dont les livres sont fictifs »,
  • « livre dont le contenu est surréel »
  • « livre d’aventure »
  • « livre dont les actions (faits) sont irréels »
  • « c’est un roman, une histoire paranormale, iréel » (iréel au masculin)
  • « l’histoire est incohérente à la réalité »
  • « histoire fausse »
  • « livre qu’on lit pour se divertir ou en cours »

Classement des livres de fiction

Pour le classement des livres de fiction, les élèves ont du mal à citer correctement le mode de classement : il manque soit le genre, soit la mention de l’ordre alphabétique du nom de l’auteur.

Livres documentaires

Définition du livre documentaire

Exemples de définitions approximatives ou erronées proposées pour définir un livre documentaire :

  • « livre fait à partir de choses qui parle de sciences »
  • « livre où est décrit quelque chose de réel »
  • « livre qui est rempli de documents pour nous informer »
  • « livre où est expliqué de A à Z la « vie » de quelque chose / quelqu’un »
  • « le contenu est proche du réel »
  • « qui donne des informations sur différents types de choses »

Classement des livres documentaires

Un seul élève, que j’ai eu en 6è il y a quatre ans, mentionne la classification décimale de Dewey : « c’est Dewey ». Là encore, les imprécisions ou erreurs sont également nombreuses :

  • « ordre alphabétique du titre »
  • « par catégorie »
  • « les trois premières lettres du nom de l’auteur et un numéro par ordre alphabétique »
  • « on mais [met] aussi avec des couleurs et thème »
  • « avec les chiffres »

Deux élèves (qui ont travaillé ensemble !) ont répondu par la localisation géographique dans le CDI : « partie nord du CDI » ; « partie sud-est du CDI »…

Question 2 : « Eléments bibliographiques »

"Eléments indispensables pour retrouver dans le CDI un livre, un périodique, ou un site internet."

Les élèves ne se rendent pas compte que donner un titre (de livre ou de périodique, d’article) ne peut pas suffire à le retrouver dans le CDI. Ce constat rejoint l’observation des pratiques des élèves en TPE ou en ECJS que nous voyons chercher des références de documents sur BCDI, puis ne pas parvenir à les retrouver dans le CDI parce que les références qu’ils ont notées sont incomplètes ou inexactes.

En revanche, pour retrouver un site internet, un certain nombre (30%), est capable d’évoquer l’adresse, mais nous sommes loin de pouvoir considérer cette notion comme acquise.

Nous n’avons pas pris en compte la sous-question « Les éléments que tu as cités sont-il suffisants pour rédiger la bibliographie d’un travail de recherche ? Pourquoi ? » car très peu d’élèves y ont répondu.

Questions 3 et 4 : « Cote »

"Trouve dans le CDI le livre rangé à la cote ci-dessous. Note son titre et son auteur, ainsi que le nom de la classe et la couleur associée (en regardant les panneaux) ; précise de quel type de livre il s’agit."

"Trouve dans le CDI le livre rangé à la cote ci-dessous. Note son titre et son auteur et précise de quel genre de document il s’agit."

Si les élèves ont du mal à rédiger la définition et à expliquer le classement des livres au CDI, ils sont en revanche moins de 20 % à ne pas retrouver le livre de fiction ou le livre documentaire qui leur est demandé. Quelques uns cherchent le livre documentaire parmi les rayons de fiction, ne prenant en compte dans la cote que les premières lettres du nom de l’auteur.

Concernant les besoins de formation, certains élèves ont indiqué qu’ils n’allaient jamais au CDI au collège et d’autres que ce n’était pas eux qui allaient chercher les documents. D’autres encore ont précisé qu’ils ne voyaient pas la différence entre fiction et documentaire.

Question 5 : « Références bibliographiques »

"Imagine que tu as utilisé un article de périodique lors d’une recherche documentaire. Observe les unes de périodiques qui sont présentés sur les tables pour retrouver l’article demandé. Trouve l’article dans le magazine et note ses références bibliographiques." [Compétence 4.4 du B2i]

Il est demandé aux élèves de retrouver un article parmi les unes de quelques revues disposées sur une table ; une fois l’article retrouvé, il fallait noter ses références bibliographiques en respectant la norme Z44-005. Il apparaît ainsi que 75% des élèves ne savent pas ce que sont des références bibliographiques, ni comment les rédiger.

Les erreurs relevées viennent du fait que la plupart des élèves donnent des renseignements non pertinents : code barre du périodique, n° d’exemplaire attribué par BCDI, titre de l’article sans le titre de la revue, autres titres de la une…

Aucun élève n’a su rédiger correctement la référence bibliographique (conformément à la norme), car même si l’ensemble des éléments figurent dans la réponse, ils ne sont pas présentés dans l’ordre ni ne respectent la ponctuation.

Par ailleurs, certains élèves ne pensent pas à préciser la date et le numéro du périodique. Ils ne notent que le titre du périodique et/ou celui de l’article.

Cela montre que peu d’élèves ont eu l’habitude au collège de noter les références bibliographiques des documents utilisés lors d’une recherche d’information, condition pourtant nécessaire pour respecter le droit d’auteur. Cette compétence était pourtant inscrite dans le B2i dans sa version antérieure à décembre 2011 sous l’intitulé : B2i 4.4 « Je sais constituer une bibliographie incluant des documents d’origine numérique » (remplacé en décembre 2011 par « Il sait relever des éléments lui permettant de connaître l’origine et d’évaluer la fiabilité/validité de l’information (source, date, etc.). »

Question 6 : « Quotidien »

"Le CDI est-il abonné à un quotidien ? Si oui, note son titre.

Cette question n’a pas été traitée par 54% des élèves bien que le JSL et Le Monde étaient exposés en évidence dans le CDI. Des élèves ont cité des titres d’hebdomadaires (L’Express, Le Nouvel Economiste, Time), de mensuels (60 millions de consommateurs), de trimestriels (Chine plus).

On peut aussi se demander si certains élèves n’ont pas tout simplement « sauté » la question sans la voir, car elle n’était peut-être pas suffisamment visible dans le questionnaire.

Question 7 : « Recherche sur catalogue »

"Réponds à la question en utilisant BCDI. Choisis un document parmi la liste de résultats et note les références qui te permettront de retrouver ce livre dans le CDI. Entoure le mode de recherche utilisé." [Compétence 4.1 du B2i]

Près de 80% des élèves n’ont pas répondu correctement à la question demandée sur BCDI, alors que cette compétence est inscrite dans le B2i collège . La plupart d’entre eux savent toutefois que BCDI concerne les documents du CDI.

Parmi les erreurs relevées :

  • une mauvaise utilisation des mots clés : utilisation de mots vides comme les articles ou le mot « document » ; certains reprennent la question posée telle quelle : ex : « documents sur la justice en France ». Ils agissent d’ailleurs de la même façon quand ils font des recherches sur Internet. Cela donne une multitude de résultats très approximatifs ;
  • la non-utilisation des restrictions de recherche, ce qui a pour conséquence un important nombre de résultats parmi lesquels ils prennent le premier document, sans prêter attention au support demandé (un livre). Parmi les références de documents relevées, beaucoup concernent un périodique ;
  • les références nécessaires pour retrouver un document sont encore une fois mal connues : certains les accompagnent du n° d’exemplaire ou de l’emplacement dans le CDI, précision qui, si elle peut être utile, ne fait pas partie à proprement parler d’une référence.

Si on analyse les besoins en formation à BCDI pour un échantillon de 126 élèves (soit 4 classes), 106 élèves (84%) ont donné une réponse erronée ou n’ont pas répondu à la question, mais seuls 37 élèves (29%) ont conscience d'avoir besoin d’une formation sur l’utilisation du logiciel documentaire.

Parmi les besoins de formation formulés par les élèves, voici quelques exemples relevés :

  • « Je n’ai jamais utilisé BCDI »
  • « CDI tout petit, pas énormément de livres et il était facile de les trouver seule, sans BCDI »
  • « Utilisation de BCDI qui remonte à la 6è »,
  • « Pas d’utilisation de BCDI avant aujourd’hui »
  • « BCDI pas simple à utiliser »
  • « Je n’ai pas de souvenirs de BCDI »
  • « Je ne sais plus aller sur BCDI et ne sais plus comment ça marche »
  • « Certaines choses n’ont jamais été expliquées ou ont été mal expliquées superficiellement (BCDI) »

Un élève vient d'un collège d'Alsace et dit ne pas avoir utilisé BCDI avant ce test. Une autre élève précise : « Lecture des informations de la notice »

Les besoins de formation exprimés par les élèves ainsi que la correction de cette question vont à l’encontre des représentations que se font nombre d’enseignants sur les compétences de leurs élèves dans le domaine de la recherche d’informations. Lorsque nous proposons par exemple d’accompagner les élèves lors de leur première séance de recherche d’information sur le logiciel documentaire dans le cadre de l’ECJS notamment, la plupart refuse : « ce n’est pas la peine, en lycée, ils savent faire ».

Le passage de BCDI à e-sidoc permettra de remédier au problème de la non utilisation des restrictions de recherche en amont, mais ne règlera pas pour autant le fait que certains élèves semblent avoir peu d’occasions d’utiliser cette base de données au collège en dehors des traditionnelles séances de formation des classes de 6è.

Question 8 : « Moteur de recherche »

"Peux-tu citer 3 noms de moteurs de recherche ? Pour chacun d’eux, précise si tu le connais bien ou non."

La plupart des élèves citent au moins un moteur de recherche. Parmi eux, la prépondérance de Google se vérifie, puisqu’il est cité par plus de 3 élèves sur 4, loin devant Yahoo, Bing, Ask... Pour les 4 classes corrigées plus finement, Google est même cité 111 fois pour 126 élèves (88%), dont 97 fois pour une utilisation régulière (77%). Exalead, par contre, n’est cité par aucun élève.

On note par ailleurs des confusions dans les notions entre moteurs de recherche, sites, navigateur internet, fournisseur d’accès, système d’exploitation, logiciels de messagerie instantanée…

Question 9 : « Droit de l’image »

"Lorsque tu utilises une image trouvée sur Internet pour illustrer un travail scolaire, tu peux le faire sans mentionner le nom de l’auteur de l’image : oui/non. Justifie ta réponse." (Compétence 2.3 du B2i).

La moitié des élèves (seulement !) a conscience que l’on ne peut pas utiliser une image trouvée sur Internet sans citer le nom de l’auteur, mais tous ne précisent pas qu’il s’agit de respecter le droit d’auteur. De plus, quelques élèves confondent droit d’auteur et droit à l’image. Par ailleurs, en pratique, nous constatons que peu d’élèves prennent la peine de citer les références des images qu’ils utilisent lors d’une recherche, et que tous les enseignants n’ont pas cette exigence.

5- Des points à améliorer…

Cette évaluation diagnostique nous a demandé un travail considérable de correction dont je n’avais pas mesuré l’ampleur en particulier pour les quatre classes que j’ai souhaité analyser finement et pour lesquelles j’ai souhaité donner aux enseignants une photographie précise des notions acquises et à consolider pour chaque élève.

Il faut avouer que je n’avais pas suffisamment pensé à la grille de correction au moment d’élaborer le questionnaire, ce qui a induit quelques différences de correction entre ma collègue et moi-même et à la non prise en compte du collège d’origine des élèves. L’an prochain, nous axerons notre questionnaire sur la recherche sur internet et nous proposerons l’évaluation diagnostique sous forme de formulaire Google Documents, pour lequel le dépouillement sera effectué à l’aide d’un tableur, ce qui nous simplifiera grandement la tâche et permettra une analyse fine et rapide de tous les résultats.

6- Bilan : les formations à prévoir

Les résultats globaux (cf tableau ci-dessous) montrent que sur les 14 compétences testées, seules 4 sont réussies par plus de 50% des élèves.

Taux de réussite par question

Resultats-par-questions

Fig. 1. Synthèse des résultats obtenus selon l’ordre des questions

Un constat : des notions info-documentaires peu ou pas acquises

La répartition des résultats du tableau par ordre croissant du taux de réussite aux questions permet à présent de visualiser l’étendue des difficultés que rencontrent les élèves à l’entrée en seconde (voir fig. 2). Il apparaît ainsi que 10 des 14 notions testées ne sont pas maîtrisées par un élève sur deux. En fait, on peut répartir ces résultats en trois groupes très inégaux :

  1. Deux notions plutôt maîtrisées (au delà de 70% de réussite) :
    • « cote » des livres de fiction (90%) et des livres documentaires (83%)
    • « livre de fiction » (78%)

Encore doit-on minimiser cette réussite en considérant que l’exercice était « pratique » puisque les élèves devaient exprimer une compétence procédurale (trouver un livre dans le CDI) et non pas verbaliser une notion de manière à rendre compte de sa compréhension.

  1. Trois notions moyennement maîtrisées (entre 40 et 70% de réussite) :

    • « livre documentaire » (67%)
    • « droits d’auteur » (48%)
    • « quotidien » (45%)
  2. Huit notions insuffisamment maîtrisées (entre 0 et 40% de réussite) :

    • « Éléments bibliographiques d'un site Internet » (31%)
    • « Références bibliographiques » (24%)
    • « Recherche sur catalogue » (20%)
    • « Éléments bibliographiques d'un livre » (20%)
    • « Éléments bibliographiques d'un article de périodique » (20%)
    • « Classement des livres de fictions » (19%)
    • « Moteurs de recherche » (18%)
    • « Classement des livres documentaires » (14%)

Histogramme-maitrise-des-notions-info-documentaires Fig. 2. Résultats de l’enquête par questions selon le taux de réussite.

Nous avons été étonnées, pendant le test, de voir autant d’élèves peu familiarisés avec les ressources d’un CDI (se déplaçant au hasard dans les rayons, cherchant dans les périodiques – pour la question 5 - sans prendre la peine de lire la première de couverture et le sommaire, où l’article recherché était pourtant bien identifié…) et plus encore du faible taux de réussite aux huit notions maîtrisées par moins de 40% des élèves, qui ont pourtant théoriquement bénéficié de quatre années de formation au collège. La notion de bibliographie notamment (questions 2 et 5 – entre 20 et 30% de réussite) est une des compétences évaluée au B2i lycée (B2i 4.4 : je sais constituer une bibliographie incluant des documents d’origine numérique) mais ne semble être que très peu abordée au collège, alors même que la nécessité de respecter les droits d’auteur impose de citer les références bibliographiques des documents utilisés lors d’une recherche d’information.

Il apparaît clairement qu’il est nécessaire, pour construire une culture commune, d’identifier précisément les notions et savoirs info-documentaires à faire acquérir de façon systématique à chaque élève, et que si les notions travaillées lors de la formation en 6è – mise en place dans la plupart des collèges - ne sont pas réinvesties les années suivantes, celles-ci ne sont pas transformées en connaissances.

Des constats à l’élaboration d’un plan de formation

Au vu de ces résultats globaux, il nous a paru indispensable de revenir sur les compétences mal maîtrisées, en premier lieu sur :

  • La recherche sur le logiciel documentaire (BCDI) ou le portail (e-sidoc) (B2i), pour apprendre à sélectionner des documents parmi les résultats de la recherche, et à noter les références utiles pour les retrouver ensuite dans le CDI. -La rédaction d’une bibliographie rédigée conformément aux normes, et comprenant des documents d’origine numérique, indispensable tant pour préparer nos élèves à l’enseignement supérieur que pour leur permettre de respecter la propriété intellectuelle.
  • L’utilisation des documents, y compris iconographiques, dans le respect du droit d’auteur.

Ces compétences ont été travaillées dans le cadre de séances d’ECJS (Education Civique, Juridique et Sociale), de MPS (Méthodes et Pratiques Scientifiques) et d’Aide Personnalisée, mais n’ont pas pu être réalisées avec tous les élèves.

A partir de l’an prochain, d’autres séquences devraient également être élaborées qui trouvent leur légitimité sur l’observation des pratiques des élèves dont certaines n’ont pas été testées ici. Il s’agirait de :

  • La recherche sur Internet (B2i), peu testée ici, que les futurs citoyens doivent impérativement maîtriser. Les pratiques de nos élèves montrent une propension à choisir un site trouvé dans la première page de résultats, sans s’interroger sur le statut du site ni sur l’origine de l’information. Il nous paraît nécessaire au cours des séances non seulement d’aborder la connaissance et l’utilisation de différents moteurs de recherche et de leurs fonctions avancées (B2i 4.2), mais aussi d’apprendre aux élèves à s’interroger sur la pertinence des sites consultés et d’être capable d’énoncer des critères de tri de l’information (B2i 4.3). Certains élèves de seconde et de première STG ont déjà travaillé cette année sur la fiabilité des documents trouvés sur internet (dans le cadre de séances d’aide personnalisée notamment).
  • L’utilisation d’outils de veille (B2i 4.1)
  • La gestion de son identité numérique
  • L’exploitation de l’information : l’observation des pratiques des élèves montre qu’il est en outre nécessaire de les former à la sélection de l’information et à la prise de notes car nombre d’entre eux se contentent de « copier-coller ».

Cette année, les résultats de cette évaluation n’ont pu être transmis que tardivement aux professeurs, notamment en raison du temps passé jusqu’à la Toussaint à gérer les manuels scolaires. Il ne nous a alors pas été possible de mettre en place pour toutes les classes le « programme » de formation que nous avons élaboré pour les élèves de seconde.

7- Se donner des moyens pour promouvoir l’enseignement de l’information-documentation

Il semble nécessaire d’inscrire dans le contrat d’objectifs de l’établissement l’enseignement de l’information-documentation mis en œuvre par le professeur documentaliste en étroite concertation avec les enseignants. C’est un chantier de longue haleine qui s’ouvre et qui devrait inclure également la formation des enseignants à la démarche de recherche d’informations.

Cela amène à s’interroger sur l’enseignement de l’information-documentation : comment faire en sorte que cet enseignement ne soit pas uniquement un ensemble de techniques procédurales, qu’il ait du sens pour chaque élève et qu’il puisse l’aider à construire un savoir ? Pour pouvoir être dispensé à chaque élève, cet enseignement ne pourra être effectif dans chaque établissement que s’il est enfin pris en compte au niveau institutionnel et inscrit dans un programme de formation à l’information documentation, sous la responsabilité pédagogique du professeur documentaliste, ce qui permettra qu’il ne soit plus tributaire des aléas de la qualité des collaborations avec les enseignants de disciplines.

Cela oblige également à se poser la question du nombre de postes de professeurs documentalistes par établissement : en effet, mener à bien 5 à 6 heures de formation par élève (ce qui nous semble un minimum) dans un établissement de 13 classes de seconde, dans le cadre de séances en demi-classe, revient à dispenser 130 à 156 heures de formation, auxquelles s’ajoutent celles consacrées aux autres projets mis œuvre par les professeurs documentalistes ou auxquels ils participent.

Pour conclure, cette évaluation-diagnostique nous a rapidement et nettement révélé des lacunes flagrantes dans les connaissances info-documentaires des élèves sortant du collège et ce, dès la mise en oeuvre des séances, avant même les corrections. Ces lacunes, sous-estimées par la plupart des professeurs, concernent l’autonomie, l’efficacité voire l’esprit critique dans la recherche d’informations. Par ailleurs, une certaine passivité ou un manque d’intérêt de la part de certains élèves nous questionne, alors même que l’enjeu dépasse le cadre scolaire.

Un plan de formation à l’information–documentation prenant en compte ces réalités est plus que jamais nécessaire. Il est indispensable de faire en sorte que cette formation, au collège puis au lycée, ne dépende plus du bon vouloir de l’enseignant documentaliste et des collaborations avec ses collègues de disciplines. Il est nécessaire de l’inscrire dans les programmes pour qu’elle soit dispensée dans chaque établissement, progressivement sur la durée de la scolarité, à partir d’un corpus de notions préalablement déterminées comme indispensables au futur citoyen. Dans notre lycée aussi, en l’absence d’heures dédiées à la formation à l’information-documentation, cette formation a été tributaire des collaborations engagées avec les équipes disciplinaires, et inégalement dispensée aux élèves.

Cette évaluation nous a permis de dégager des besoins de formation pour les élèves de seconde et de nous fixer des objectifs à atteindre en terme de formation. Certains des objectifs fixés n’ayant pas été atteints, nous ferons en sorte, dès la rentrée prochaine, de prévoir des séances de formation pour les élèves de première dès le démarrage des TPE.


Je remercie chaleureusement Pascal Duplessis pour ses précieux conseils dispensés lors de la relecture attentive et bienveillante de cet article.


Téléchargements

Annexe 1 : Le questionnaire

Annexe 2 : Les questions et notions info-documentaires évaluées

Annexe 3 : Les besoins en formation par questions et résultats de l’évaluation par classe

Annexe 4 : Un exemple de questionnaire corrigé anonymé


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