Référence documentographique

DUPLESSIS Pascal. Trois obstacles à l’idée d’une discipline de l’Information-documentation [en ligne]. 8e Congrès de la FADBEN « Culture de l'information : des pratiques aux savoirs ». Lyon, 28, 29, 30 mars 2008. Table ronde : « Les savoirs en information-documentation : recherches, développement actuel et perspectives d'acquisitions scolaires ». Site des Trois couronnes, mars 2008. URL :

http://lestroiscouronnes.esmeree.fr/didactique-information/trois-obstacles-a-l-idee-d-une-discipline-de-l-information-documentation

Trois obstacles à l’idée d’une discipline de l’Information-documentation

Séance pédagogique en salle multimédia. CLG F. Villon. Les Ponts-de-Cé (49). 2007

Participation à la table ronde « Les savoirs en information-documentation : recherches, développement actuel et perspectives d'acquisitions scolaires » au 8e Congrès de la FADBEN « Culture de l'information : des pratiques aux savoirs », Lyon, 28, 29, 30 mars 2008.

Presque 20 ans après l’instauration du CAPES de Sciences et techniques documentaires, l’idée d’une discipline de l’Information-documentation fait toujours débat. Etonnant CAPES que celui de Documentation, en vérité, qui n’est pas attaché à une discipline comme tous les autres, et qui doit même se justifier lorsqu’il est convoqué pour légitimer un enseignement ! Quoi, entend-on encore trop fréquemment, il faut un CAPES pour classer des livres ?! Quoi, les « documentalistes » évaluent les élèves ? Bien que de statut enseignant, la profession pâtit de son attachement à la Vie scolaire, source de bien des confusions et de bien des manipulations. L’appellation double de professeur documentaliste entretient également durablement cette ambiguïté : un CAPES de Mathématique ou d’Education musicale fait-il pour autant des professeurs mathématiciens ou des professeurs musiciens ? Ces derniers sont-ils des « mathématiciens et des musiciens en milieu scolaire », de la même manière qu’on peut lire quelquefois que les professeurs documentalistes seraient des « documentalistes en milieu scolaire » ? Non. Le CAPES de Documentation n’est pas un diplôme de documentaliste ou de bibliothécaire et n’a pas à se substituer à un DUT ou à un DEUST. Il est décerné à un professeur enseignant la Documentation dans un centre à la double valence d’outil didactique et de service d’information, et dont il a la responsabilité.

Si la grande majorité des professeurs documentalistes aujourd’hui se réclament enseignants, ils hésitent cependant à assumer l’éventualité du corrélat disciplinaire. Certes le cadre disciplinaire n’a pas été fourni avec l’enseignement qui découle du statut, certes l’institution, qui admet par ailleurs l’existence de ce « champ disciplinaire » retarde à généraliser un programme qui existe déjà ailleurs, notamment dans la série STG ou dans l’enseignement agricole. Mais pour autant, le blocage n’est pas qu’institutionnel. Il doit être recherché au cœur même de la profession, c’est-à-dire dans ce qui l’origine et la constitue. A l’heure où une sorte de fatalité historique (l’éternel échec de la pédagogie nouvelle), politique (le retour vers une éducation traditionnelle) et économique (« l’économie de la connaissance » prônée par la « stratégie de Lisbonne ») semble frapper le corps des enseignants documentalistes et freiner son évolution, ces derniers ne peuvent plus éluder les questions vives d’un débat qu’ils ajournent régulièrement depuis plus de 20 ans.

Ces blocages sont avant tout de nature identitaire. Et c’est à partir de ce point de portée générale, point consensuel au moins au départ, que nous tenterons de prendre à bras le corps les résistances à l’idée d’une discipline de l’Information-documentation. Ces résistances nous apparaissent comme autant de représentations faisant obstacle à l’évolution du processus de professionnalisation des professeurs documentalistes. Si les facteurs responsables de cette méfiance ressentie par la profession à l’égard de l’option disciplinaire sont complexes et mériteraient un long développement dans le cadre d’une sociologie des professions, il est toutefois possible d’avancer quelques repères en espérant qu’en mettant à plat un certain nombre de non-dits, une réflexion commune puisse être entreprise qui interrogerait ces représentations et permettrait de lever les obstacles.

Nous avançons ainsi que ces obstacles pourraient provenir d’interférences avec le modèle canonique que constitue la pédagogie dite traditionnelle, entraînant dans son cortège de vives protestations un certain nombre de confusions sur l’idée d’une discipline originale. Au nombre de ces protestations à saisir comme autant d’indices à lever pour comprendre, il nous faudra également interroger les représentations professionnelles sur les savoirs à enseigner et sur l’évaluation des apprentissages…

1. Qu’est-ce qu’une discipline ?

A se référer aux seuls formulaires administratifs, la Documentation est bien une discipline enseignée dans le secondaire, et ce, depuis l’instauration d’un Capes de Documentation en 1989. Par contre, les documents institutionnels relatifs aux programmes, accompagnements et dispositifs pédagogiques ou éducatifs ne la mentionnent jamais comme telle. Il n’est question que du lieu CDI et, éventuellement, de ses responsables dont l’appellation n’est qu’à quelques occasions donnée dans son intégralité. Dans les années 80, le volet pédagogique était désigné par les expressions de « méthodologie » ou de « démarche documentaire », avant d’être indexé, dans la décennie suivante, par le syntagme « compétences documentaires », voire « compétences transversales ». Ces dernières années, l’institution tente de faire pénétrer de nouvelles formes, comme celles de « fonction documentaire », appelant au « service »1 par opposition, dans ce contexte, à l’enseignement, et visant par conséquent à épurer ladite matière de sa substance pédagogique. Qu’en disent les acteurs sur le terrain ? Il est curieux de constater que là même où s’actualise et se vit la pédagogique documentaire, l’usage du terme de discipline s’avère sensible, et qu’il est de fait souvent remplacé par le simple vocable de « Documentation ». On dira tout simplement « la doc » pour référer au champ de la formation des élèves. Pourquoi donc un tel évitement ?

Le postulat à partir duquel nous choisissons de réfléchir pose que le processus de professionnalisation des professeurs documentalistes est en partie enrayé par une série de représentations particulières de la notion de discipline, représentations qui empêchent la profession de s’affilier complètement au statut de professeur. Mais qu’entend-on au juste par discipline ?

1.1. Historique

Nées au début du XXème siècle, les disciplines ne s’imposeront à notre système éducatif dans leur acception actuelle qu’au tournant des années 40 seulement. Ce sont les héritières des classifications positivistes du XIXème, lorsque les différents ordres d’enseignement étaient encore appelés branches ou matières [Chervel, 1998]. Il est d’ailleurs étonnant de remarquer combien la dimension pluri-référentielle des disciplines est redevable de cette découpe originelle des sciences qui avait pour but d’organiser et de hiérarchiser des savoirs qui connaissaient alors une croissance exponentielle. Ainsi l’histoire co-existe-t-elle avec la géographie, et le français regroupe-t-il la lecture, la littérature, l’orthographe et la grammaire.

Mais cette multi-référentialité provient également du terreau épistémologique dans lequel la discipline plonge ses racines et se nourrit [Pagès, 1993]. L’Information-documentation en fournit un bel exemple puisqu’elle combine des savoirs généralistes (sciences de l’éducation, philosophie, épistémologie, sciences cognitives), des savoirs spécifiques (sciences de l’information et de la documentation, bibliothéconomie, bibliographie) et des savoirs référentiels (experts, sociaux et issus des savoirs scolaires). Horizontalement, et à l’instar de toute discipline, elle profite également des interactions avec ses voisines et de la migration d’un certain nombre de leurs concepts. Là encore le découpage disciplinaire n’est jamais si net qu’il admet des frontières souples et poreuses, au gré de l’avancée des connaissances scientifiques.

Il convient encore de se garder de confondre les disciplines universitaires et les disciplines scolaires et de croire que les secondes dépendent entièrement des premières. Comme le souligne Chervel [Ibid.], les disciplines scolaires sont des entités particulières créées par l’Ecole afin de répondre à des finalités sociales. La référence affichée aux sciences ne joue alors bien souvent qu’un rôle de légitimation. Construction sociale, travaillée par l’histoire, la discipline scolaire se présente encore comme une institutionnalisation de l’enseignement, laquelle lui offre ainsi les voies de la légitimation pour sa reconnaissance, lui fournit un cadre légal et formel d’application, définit ses contenus et lui attribue les moyens de sa réalisation.

Cela dit, comment définir la notion de discipline ?

1.2. Définition

1.2.1. D’abord un questionnement

Pour les didacticiens, une discipline est d’abord un questionnement, un certain regard que l’on pose sur le monde pour l’interroger [Astolfi, 1992]. Il ne faudrait pas croire pour autant que c’est l’objet étudié qui caractérise la discipline, un même objet pouvant être différemment interprété par plusieurs disciplines de manière complémentaire. C’est plutôt la manière dont il est perçu, interrogé et conceptualisé qui va permettre de la distinguer des autres. C’est la pertinence et l’efficacité du questionnement, dans le sens où celui-ci permet de déboucher sur une nouvelle représentation du monde, qui singularise la discipline. Chaque nouvelle discipline agrandit ainsi l’univers au travers de l’élargissement de son entendement du monde et, de ce fait, enrichit l’homme dans sa quête de vérité. En conséquence, non seulement ce n’est pas un objet « déjà là » qui fait naître la discipline, mais inversement, c’est la discipline qui accouche de ses objets : « la science n’atteint jamais que ce que son mode propre de représentation a admis d’avance comme objet possible pour lui »2 [Mabilon-Bonfils et Saadoun, 1997]. La tâche d’une discipline est bien de créer ses propres objets. La question est toute aussi vitale s’agissant de l’Information-documentation : les concepts essentiels (Document, Information, Source, Indexation, etc.) qu’elle revendique sont-ils des produits ou des acquis ? Comment démarquer son regard sur ces objets de ceux des autres disciplines telles que le Français ou l’Histoire ?

1.2.2. Une acculturation

Nous avons rappelé que la discipline apportait un cadre institutionnel à l’enseignement. Celui-ci présuppose l’existence de contenus, et renvoie en premier lieu aux termes de « cours » et de « matière » qui étaient utilisés jusqu’au début du XXème siècle. Encore faut-il aujourd’hui ne pas restreindre cette matière aux seuls contenus académiques des programmes, mais y inclure dans une large mesure tout ce qui ressortit aux problématiques liées aux objets d’étude, aux théories, aux concepts et aux méthodes, aux schèmes mentaux à développer chez l’apprenant ainsi qu’aux aux compétences à acquérir. Dans ce sens, une discipline offre à l’élève une perspective d’acculturation sociale à un champ spécifique de savoirs. Nous penserons bien évidemment, quant à nous, à la culture de l’information.

Plus concrètement, Michel Develay définit la discipline comme une configuration épistémologique singulière [Develay, 1992]. Celle-ci articule entre eux des objets didactiques spécifiques (cartes géographiques, planches anatomiques, etc.) créés pour la classe ou réinvestis par elle, des tâches à effectuer par les élèves, dans le but de leur faire construire les savoirs nécessaires au franchissement d’un obstacle épistémologique ou cognitif, des connaissances de types déclaratif et procédural, ainsi qu’une « matrice », i.e. un cadre de référence offrant un point de vue actualisé qui organise la totalité de ces éléments en un ensemble cohérent, et qui définit la discipline selon un principe d’intelligibilité particulier. Ces éléments fournissent autant de points d’entrée à une réflexion portant à la fois sur le paradigme général (la matrice disciplinaire) et sur les modalités précises à examiner pour penser une discipline de l’Information-documentation.

1.2.3. Une discipline de l’esprit

Une autre acception de la notion de discipline, usitée au début du XXème siècle et un peu en retrait aujourd’hui, insiste sur sa dimension formative. Selon cette approche qui ambitionne d’aller au-delà de la simple transmission des contenus, il s’agit ici de « discipliner l’esprit » en lui apportant les règles et les méthodes nécessaires à l’appréhension des domaines considérés. Plus encore qu’une gymnastique intellectuelle, la discipline est alors pensée comme devant développer des capacités de juger et de raisonner [Demol, 2003]. Cette intention se retrouve facilement aujourd’hui dans certaines disciplines cherchant à faire acquérir une démarche de travail intellectuel, comme par exemple les Sciences physiques ou les S.E.S.

C’est précisément le cas de l’Information-documentation, pour laquelle le savoir de l’information est de moins en moins un « savoir trouver et exploiter » et de plus en plus un « savoir évaluer et bien utiliser » mobilisant des qualités critiques et un esprit de responsabilité. Cette évolution de paradigme montre que l’information, au sens de champ disciplinaire, doit être saisie en tant que compétence à construire par l’école. Cette compétence engage, au travers de l’apprentissage de savoirs spécifiques, la maîtrise d’une triple posture face à l’information : la posture du scientifique en recherche de davantage de vérité, la posture du philosophe qui vise une pensée juste parce que logiquement construite et, enfin, la posture du citoyen en quête de liberté et de responsabilité. Ces trois dimensions dessinent ainsi les contours d’une pensée critique appliquée à la culture informationnelle. Si cette compétence nécessite la maîtrise de savoirs sur l’objet informationnel, ce n’est pas pour autant l’objet scolaire seulement qui doit être didactisé, comme tout concept informationnel, mais un certain regard documentaire, comprenant deux des acceptions identifiées pour déterminer la discipline : un questionnement caractéristique et une « discipline de l’esprit » en phase avec ce type de questionnement. Pour Jean-Pierre Astolfi, si l’on est passé dans les années 40 d’une discipline de l’esprit à une discipline envisagée comme matière, il serait heureux que l’enseignement secondaire aujourd’hui réconcilie les deux [Astolfi, 1990].

Ainsi peut-on considérer que si une discipline est un objet culturel qui se donne pour but d’intégrer les élèves à cette culture, elle peut être pensée comme articulant l’appropriation de savoirs, la formation à un regard heuristique et le développement d’un esprit méthodique.

2. L’obstacle du modèle pédagogique

Cette vision de la notion de discipline nous semble fort éloignée des représentations que s’en font les acteurs de terrain, notamment les enseignants documentalistes. Certaines de ces conceptions, très en retrait par rapport au modèle que nous avons précisé, font obstacle à l’idée qu’une discipline de l’Information-documentation puisse être considérée.

2.1. Une critique du modèle traditionnel

Même si les représentations ont évolué, les réactions d’une partie de la profession restent vives à l’énoncé même du mot « discipline ». De manière générale, celle-ci nourrit peu d’estime à l’égard des pratiques observées chez certains de ses collègues disciplinaires et elle se félicite la plupart du temps de n’avoir pas à les imiter. La focalisation de ces critiques se fait notamment sur les caractéristiques d’un enseignement qui est jugé frontal, transmissif, verbal, théorique et borné par la sanction. Ce jugement sévère, empreint de connotations négatives, se fonde sur une représentation d’un modèle pédagogique dit traditionnel qui est né à la fin du XIXème siècle, à une époque de rationalisation poussée de l’instruction et du rôle de ses maîtres. Si tel professeur, parce qu’il est connu et reconnu, notamment parce qu’il vient travailler au CDI, ne saurait être traité à la même enseigne, l’impression générale de la profession s’avère toutefois englobante et généralisante. Qui plus est, cette mise en cause des « professeurs » dans leurs pratiques et dans leurs méthodes semble jouer un rôle de catalyseur permettant à la profession de se reconnaître à partir d’une série d’oppositions pour le moins radicales.

Trait pour trait, on retrouvera cette critique dans le procès qu’a fait le mouvement de l’Éducation nouvelle, à partir de cette fin du XIXème, à l’école de cette époque. « Et sur les indications du diable, on créa l’école » pouvait résumer Adolphe Ferrière en 19213. Cette véritable « révolution copernicienne » (Claparède, 1905) prend appui sur un renversement des pouvoirs entre le maître et l’élève, instituant désormais ce dernier comme le principal acteur de son éducation. Les postulats de l’enseignement traditionnel sont véritablement diabolisés à partir d’une vision globale de l’éducation, bien que les courants et les méthodes de ce mouvement tiennent davantage de l’expérimentation que de la systématisation. On reprochera à l’école traditionnelle un enseignement reposant sur la parole autoritaire du maître, avec pour corollaire la docilité et à la passivité de l’élève, sur le caractère abstrait des savoirs scolaires et le verbalisme de leur transmission et, enfin, sur les valeurs conformistes et individualistes qui en résultent.

2.2. L’éloge d’un modèle alternatif

Diamétralement opposée à ces conceptions, l’Éducation nouvelle s’appuie sur des fondements philosophiques hérités des Lumières et de Jean-Jacques Rousseau, ainsi que du vitalisme (l’élan vital de Bergson). L’idée principale est que l’enfant sait, au moment où il en a besoin, ce qui est naturellement bon pour lui. Le mouvement de l’Éducation nouvelle profite également des recherches scientifiques de l’époque qui vont lui permettre de rationaliser ces intuitions grâce au développement de la psychologie de l’enfant (H. Wallon, J. Piaget). La portée idéologique de ce mouvement se déploie quant à elle sur un horizon politique, particulièrement marqué par C. Freinet en France, et selon lequel il faudrait « changer l’école pour changer la société… »4.

Au rang des valeurs développées par les tenants de l’Éducation nouvelle, nous retrouvons particulièrement celles portées par la devise républicaine : l’égalité (des chances d’accès et de réussite), la liberté (par l’émancipation et le travail autonome) et la fraternité (par la coopération et l’apprentissage de la vie en société). Les grands principes affirment la centration sur l’enfant (le puérocentrisme), l’apprentissage des règles sociales (la classe est une micro-société) et les vertus de l’activité de l’élève (l’école active versus l’école « assise »).

2.3. L’héritage de la pédagogie documentaire

Que les discours tenus à l’époque par les tenants de l’Éducation nouvelle apportent leur substance aux représentations des enseignants documentalistes ne fait aucun doute. Cela ne saurait d’ailleurs aucunement surprendre pour peu que l’on connaisse le contexte de politique éducative, alors en pleine réforme structurelle et pédagogique, d’où a émergé la profession dans les années 70. Les textes produits par l’inspecteur général Tallon [M.E.N., 1974], promoteur des CDI en 1974 et par Jean Hassenforder et Geneviève Lefort [1977], auteurs de l’ouvrage Une nouvelle manière d’enseigner : pédagogie et documentation, sont entièrement empreints des idées du Groupe français de l’Éducation nouvelle (GFEN5). Ce groupe fut créé en 1922 par Adolphe Ferrière et Paul Langevin et Henry Wallon, auteurs éponymes du célèbre plan de l’après-guerre pour la rénovation de l’école (1947) en furent les premiers animateurs avant d’en prendre la présidence.

C’est au mitan des années 70 donc, et dans le contexte scolaire de la massification scolaire et de la création du collège unique (réforme Haby), que l’école cherche à traiter l’hétérogénéité par des moyens pédagogiques. Par le biais de la pédagogie du document notamment, l’une des méthodes du grand courant réformateur de l’Éducation nouvelle, elle entend s’attaquer à la transmission verticale et autoritaire du savoir et ainsi déplacer le centre de gravité du maître et des programmes vers l’élève et le document. En favorisant l’accès libre à une documentation jusque là entièrement contrôlée par le professeur, en transférant le lieu sacré de l’apprentissage qu’est la classe vers le CDI et en plaçant l’élève en situation de construire lui-même son savoir par une méthode active, l’institution entend clairement positionner la Documentation, dans sa dimension pédagogique, « au cœur de la rénovation » de l’école.

Dès lors, le sème de la nouveauté, présent dans l’appellation d’Éducation nouvelle, migre dans le vocabulaire de l’époque : on ne parlera plus que de rénovation et d’innovation. Porteur des valeurs, des méthodes et des attentes du mouvement initial, on retrouve ce sème encore aujourd’hui s’agissant des dispositifs innovants, ultimes soubresauts d’une révolution éducative quasi avortée. Ainsi la profession a-t-elle été dynamisée dès ses origines, et tout au long des années 80, par l’élan formidable que lui conférait une charge peu commune et à partir de laquelle s’est forgée l’identité professionnelle : celle de représenter une alternative au modèle traditionnel et d’engager, voire de forcer son évolution, à défaut de pouvoir aboutir à une révolution pédagogique.

Philippe Meirieu exprime cette opposition duelle entre pédagogie centrée sur l’enseignant (magistocentrisme) et pédagogie centrée sur l’apprenant (puérocentrisme) à partir de deux modèles professionnels représentés par les figures du clerc et de l’enseignant bibliothécaire. Le clerc, héritier de la scolastique où seul le maître peut avoir accès au Livre et en dispenser une exégèse, s’oppose sur le fond et dans le temps à l’enseignant bibliothécaire, héritier quant à lui d’une éducation inspirée de la Réforme, où chacun doit pouvoir accéder librement aux textes originaux. La lecture pédagogique de ce conflit doit par conséquent être complétée de lectures religieuse et politique. Toujours est-il que l’enseignant documentaliste (ou l’enseignant bibliothécaire dans le modèle de Philippe Meirieu) vient rompre l’assujettissement de l’élève à la parole autorisée et permettre son émancipation par l’exercice de la critique que favorise la consultation directe et contradictoire des documents. En bref, il est celui qui apprend à l’élève comment se passer de la parole du magister. En rapprochant alors l’image du magister de celle du professeur de discipline, il est facile de comprendre les raisons pour lesquelles l’enseignant documentaliste renâcle à assumer le statut de professeur. Toute la différence entre les deux visions semble finalement tenir dans ce rapport au savoir.

Si la diabolisation véhémente des premiers discours tenus par les acteurs de l’Éducation nouvelle s’est apaisée, des traces actives n’en demeurent pas moins aujourd’hui dans ce que l’on pourrait appeler l’inconscient de la profession. Par conséquent, demander aux enseignants documentalistes de réfléchir à la construction d’une discipline les renvoie immanquablement à un modèle pédagogique contre lequel ils estiment devoir s’opposer. C’est même dans cette opposition fondatrice qu’ils justifient leur place au sein des établissements scolaires, où lieu, rôle et méthodes sont présentés à chaque fois comme des « alternatives » à la classe, au professeur et à la transmission verticale. Aussi, leur demander de devenir professeur à leur tour a de fortes chances d’être ressenti au mieux comme un écart trop important avec la matrice professionnelle d’origine, au pire comme une trahison envers son esprit et son mandat originels.

3. L’obstacle des savoirs à enseigner

3.1. La compétence, une notion en évolution

Les conséquences d’une référence identitaire à un modèle pédagogique ne se limitent pas au choix d’un style de médiation mais touchent également le statut et la nature des savoirs à enseigner. Renvoyant les savoirs théoriques aux programmes disciplinaires, la pédagogie documentaire s’est concentrée, depuis le début des années 80, sur des compétences méthodologiques et sur les processus vivants de la recherche d’information. Se réglant sur la pédagogie par objectifs, elle-même inspirée de la psychologie béhavioriste, la profession a utilisé des outils référentiels forgés à partir d’une analyse fine des activités de recherche. Un découpage en micro-compétences en est résulté, permettant de hiérarchiser les objectifs de formation et de conduire des évaluations à partir des comportements observés. A cette conception transversale de la pédagogie, où les disciplines instituées trouvent leur compte dans une dichotomie commode entre contenus (savoirs disciplinaires) et méthode (compétences procédurales documentaires), est venue progressivement se superposer une orientation spécifique axée quant à elle sur l’enseignement des concepts info-documentaires. Si l’existence de ces contenus théoriques est aujourd’hui avérée, tels que l’indiquent les premiers travaux didactiques, elle n’en constitue pas moins un enjeu de taille par ses implications à la fois éducatives et professionnelles.

Il faut ajouter à cela le fait que, depuis quelques années, l’institution élargit considérablement sa définition de la compétence, en y intégrant les connaissances théoriques, les attitudes et les capacités [M.E.N., 2007]. Ce rattrapage épistémologique, même s’il est encore contesté par les Sciences de l’éducation, est intéressant dans la mesure où il devrait conduire à une relecture des contenus d’apprentissage de l’information documentation et permettre de bouger des lignes de scission qui séparaient les tenants des procédures transversales aux tenants des savoirs spécifiques. A la décharge des premiers, notons qu’en l’état actuel des recherches didactiques, l’accès par les professionnels à ces savoirs scolaires encore fort peu didactisés, reconnaissons-le, reste très difficile. Ainsi, cette immaturité des objets d’enseignement aboutit au fait qu’ils ne sont tout simplement pas connus et que cette méconnaissance est source de doute, voire de projections négatives. Ou alors ils sont effectivement repérés, mais sous une forme qui les assimile encore, du fait de cette immaturité, à un programme décontextualisé, de type encyclopédique, c'est-à-dire en opposition radicale avec l’esprit de la pédagogie documentaire hérité de l’Éducation nouvelle. Présentés sous l’espèce de listes et de définitions par les premières publications qui ne font encore qu’œuvre de débroussaillage, ils peuvent en effet laisser augurer de ces cours magistraux honnis et au travers desquels la profession n’entend pas se reconnaître pour les raisons évoquées plus haut.

3.2. La critique des savoirs disciplinaires

Quoi qu’il en soit, la réflexion qui pourrait s’ensuivre bute une nouvelle fois sur des représentations relatives au statut des savoirs scolaires dont les seuls référents restent à la fois celui des programmes disciplinaires, s’agissant du curriculum formel, et celui des pratiques observées lors de projets inter-disciplinaires, s’agissant du curriculum réel. Les mêmes critiques déjà prononcées à l’encontre de la pédagogie dite traditionnelle trouvent là un terrain complémentaire pour exprimer le refus poli, mais ferme, d’un modèle pédagogique indexé sur des pratiques disciplinaires les plus conservatrices qui soient.

Que reproche-t-on aux « savoirs scolaires » ? Tout d’abord, d’être des savoirs théoriques qui ne peuvent être transmis que dans le cadre d’une communication verbale. Dans une vision de l’éducation où le dire s’oppose au faire et où la réception passive est le contraire d’une construction par l’activité (école active versus école assise), l’idée d’une transmission fondée sur la seule verbalisation de connaissances justement appelées « déclaratives »6, ne peut être que rejetée. Et qui plus est, lorsque le cours exposé est assimilé à un discours imposé, à l’intérieur d’un cadre scolaire où le pouvoir symbolique d’autorité conféré à la parole magistrale est renforcé par le poids de l’institution [Morandi, 2005]. Sur un autre plan, celui de l’abstraction à laquelle donne accès le verbe, Rousseau ne demandait-il pas à ce que l’on préserve les premiers âges de l’enfance du « babillage » des adultes et qu’on ne laisse parler que de ce qui peut être fait ? Ainsi la pédagogie documentaire, polarisée sur les comportements attendus des élèves en activité de recherche, préfère généralement s’attacher aux savoir faire. Ainsi « questionner un sujet », « élaborer une requête », « sélectionner des documents », « référencer l’information » sont des actions concrètes, constructrices de schèmes opérationnels qu’il est possible de réguler et d’améliorer.

L’image que restituent les enseignants documentalistes des savoirs scolaires tels qu’ils apparaissent dans les programmes disciplinaires est celle d’un ensemble organisé de notions dont la cohérence découlerait du savoir et non des intérêts de l’élève. Cet ensemble n’est à leurs yeux, comme l’exprime Jean-Pierre Astolfi [1992] qu’une succession d’énoncés qui, bien que logiquement connectés, n’en demeurent pas moins des savoirs disjoints, juxtaposés du point de vue de l’élève en recherche de sens. L’enseignant documentaliste se méfie de ce type de savoirs, au motif qu’ils ne sont pas suffisamment pratiques, et qu’à ce titre, ils n’ont aucune utilité pour l’élève.

De plus, les savoirs disciplinaires sont perçus comme trop éloignés des préoccupations de l’élève qui est pourtant sommé de se les approprier. Ils lui sont présentés comme le résultat acquis d’une démarche scientifique et d’un projet intellectuel dont il n’entend même pas l’écho [Rey, 1996] ! Décontextualisé, ce savoir est assimilé à un objet mort, sans histoire, chosifié et inerte. La vision qu’en retire l’enseignant documentaliste est que le savoir enseigné est seulement « disponible », tel un document d’archive qui n’est mobilisé que selon les besoins de l’évaluation et au cours de laquelle il doit être restitué. Les enseignants documentalistes s’insurgent contre ce qu’ils perçoivent là comme un état de fait. Dans de nombreux cas, on les voit alors qui profitent d’être associés en amont du projet pédagogique pour tendre des passerelles en direction des centres d’intérêt des élèves, perpétuant ainsi les expérimentations d’Ovide Decroly.

Ces représentations, présumées ici dans leurs grandes lignes, pourraient avoir deux causes distinctes, l’une relevant du modèle, la seconde de la référence. La première, déjà rencontrée, n’est que le prolongement logique de la critique de la pédagogie traditionnelle et de son rapport au savoir. Le savoir scolaire y est perçu comme l’antithèse d’une pédagogie fondée sur les centres d’intérêts des élèves. L’une et l’autre notions mises en opposition constante génèrent alors une série de couples de contraires irréductibles : la dimension théorique s’oppose à l’aspect pratique7, le désintérêt à la motivation, la centration sur le programme au puérocentrisme, l’abstrait au concret, la mémorisation et la répétition à l’activité et à la construction, la formalisation à la spontanéité, l’étude à la finalisation, etc.

La seconde cause vient de la référence disponible pour penser ces savoirs scolaires. Ainsi la présentation des contenus d’enseignement de l’Information-documentation semble bien ne pouvoir être envisagée que comme une imitation de ce qui a lieu dans les autres disciplines. Comment pourrait-il en être autrement tant qu’aucune proposition sérieuse n’est avancée dans le contexte actuel d’indigence conjoncturelle dont pâtit l’enseignement info-documentaire ?

Pour avoir un tableau plus complet des difficultés pressenties, il faut encore ajouter à cela les représentations à l’œuvre concernant les modalités d’élaboration de ces contenus, et particulièrement du processus de transposition didactique. Selon cette conception, en effet, tout savoir scolaire est bien trop souvent ramené à une simple réduction des savoirs universitaires.

3.3. Élaborer des savoirs opératoires

Que peut-on opposer à un tel procès ? Là encore, la réponse la plus prometteuse semble provenir des recherches en didactique, et notamment en didactiques des sciences, puisqu’elles se sont intéressées à la nature de ce que devrait être un objet d’enseignement. Pour le dire simplement, il s’agit d’élaborer et de proposer aux élèves des savoirs scolaires dont ils pourraient s’approprier les vertus formatrices au travers d’activités leur permettant de les manipuler. Le savoir scolaire doit, pour s’en tenir à cette idée, se faire outil au service d’un projet de réalisation, d’explicitation ou de résolution ; il doit donner à l’élève le pouvoir d’agir et de comprendre. Pour Y. Chevallard [1994], tout savoir doit être, pour l’acteur, un savoir en acte. Ces savoirs, à l’opposé des notions simplement juxtaposées dans les programmes, devraient pouvoir répondre à des questions que l’élève est amené à se poser. Ils sont de surcroît articulés à des compétences renvoyant elles-mêmes à un agir « juste » en situation [Crahay, 2006]. Pour nous éclairer sur ces différents états du savoir, Hélène Romian8 propose une typologie distinguant les savoirs empiriques ou expérientiels, vecteurs des conceptions des élèves, les savoirs conceptuels ou notionnels, ceux-là mêmes qui sont critiqués par le courant réformateur, et, enfin, les savoirs méthodologiques ou opératoires. Ces derniers, selon elle, constituent la visée principale de l’école. L’apprentissage peut être ainsi considéré comme achevé lorsque l’élève atteint le stade de ces savoirs opératoires. Différentes approches didactiques concluent ainsi qu’un savoir est opératoire s’il répond à un problème ou à une famille de problèmes donnés, s’il est réinvestissable dans d’autres situations, s’il est explicatif d’un nombre important de faits et s’il donne prise sur la réalité [Giordan, 1994 ; De Vecchi, 1990 ; Astolfi, 1992]. Sa dimension théorique ne l’empêche pas d’être fonctionnel, bien au contraire. C’est cette plasticité qui permet l’intelligibilité des phénomènes et fait en sorte que le savoir « serve ».

Dans le domaine de l’information documentation, on pourrait ainsi considérer par exemple que le concept d’indexation permet d’expliciter le fonctionnement des moteurs de recherche, des annuaires de sites et des OPAC, qui sont autant d’objets référentiels générateurs d’une famille de problèmes. En conséquence, s’appliquant à la réalité bien concrète des requêtes sur la toile, ce savoir « sert » à mieux formuler celles-ci et à mieux analyser les pages de résultats obtenues. Fonctionnel, le savoir opératoire est également acculturant : il permet l’accès à un nouvel univers culturel tout en fournissant les clés utiles au franchissement des différents cercles et les boussoles nécessaires pour s’orienter. Les savoirs scolaires de l’Information-documentation, tout particulièrement, assurent cette incontestable prise sur la réalité par le fait que, de plus en plus, l’objet de leur déploiement est le Web, cet espace sans mur ni frontière au-delà de l’école. Heureusement condamnée à escalader sans cesse la clôture scolaire, l’Information-documentation n’est plus cantonnée dans le périmètre de sûreté des ressources didactisées. Bien au contraire ! C’est d’ailleurs dans ce champ nouveau d’investigation, qui la distingue de nombre de ses voisines, qu’elle entend « discipliner l’esprit » à la critique et à la responsabilité. Mais cette capacité à s’ouvrir sur la réalité et sur le monde a encore pour conséquence, d’une part, d’exister en référence aux pratiques domestiques des élèves usagers de l’information (usage du blog, pratiques d’évaluation, de partage et de création collaborative d’information), et, d’autre part, de lancer des passerelles vers les autres disciplines afin de partager des objets communs favorisant l’exercice de regards complémentaires. De fait, le projet inter-disciplinaire enrichit, valorise et stimule l’enseignement info-documentaire dans le sens où tout savoir disciplinaire qui engage la médiation informationnelle pour être construit par l’élève, nécessite l’appropriation concomitante de savoirs sur l’information.

3.4. Des objets encore à construire

Il importe enfin, pour mettre en perspective les représentations sur les savoirs scolaires, de considérer que ceux-ci ne sont pas « donnés » par l’Université pour être déclinés selon les niveaux du primaire et du secondaire, mais qu’ils sont bien des « construits », tissés dans l’histoire de l’école et « riches d’une épaisseur institutionnelle » [Joshua, 1996]. Pour obtenir le statut de contenus enseignables, les objets d’enseignement info-documentaires, encore à construire à partir des savoirs savants de Sciences de l’information, des savoirs experts des documentalistes et des savoirs expérientiels des élèves, doivent être recontextualisés et traités selon les objectifs et les niveaux de classe, en tenant compte des buts que se fixe l’Information-documentation. Ces buts pourraient être déclinés en trois grandes priorités axiales : rendre l’élève plus efficace dans son traitement de l’information (axe de l’efficacité procédurale), lui fournir les outils conceptuels et culturels nécessaires à l’analyse des problèmes informationnels (axe de l’intelligibilité) et, enfin, lui faire prendre conscience des risques, des droits et des devoirs relatifs à l’usage de l’information (axe de la responsabilité) [Duplessis, 2008]. Les savoirs scolaires, comme le souligne Jean-François Halté [1992] restent des « objets du meilleur compromis possible ». Il revient à la profession, entretenant un dialogue épistémologique avec ses partenaires chercheurs et institutionnels, de les élaborer de sorte qu’ils soient vivants et opératoires. Il est de notre responsabilité de composer ce « texte du savoir » [Y. Chevallard, 1991] original, à la fois fonctionnel et acculturant, et toujours respectueux du cadre des nécessités sociales dans lequel il a pour vocation de s’inscrire.

4. L’obstacle de l’évaluation des élèves

Le sujet de l’évaluation des élèves constitue lui aussi un point d’achoppement crucial dans la maturation disciplinaire. C’est parce qu’elle touche de très près le cœur de mission de l’enseignant que l’évaluation fait partie de ces sujets délicats à manier chez les professeurs documentalistes. Par opposition à la professionnalité « Documentaliste », elle est un attribut essentiel de la professionnalité « Enseignant ». Notre rapport à l’évaluation détermine dans le premier cas l’action du « documentaliste en milieu scolaire » qui forme des usagers et, dans le second, la mission essentielle du « professeur expert en sciences et techniques documentaires » qui enseigne des savoirs à des élèves. Lorsque l’institution ne reconnaît pas cette compétence professionnelle [Durpaire, 2008], elle nie la responsabilité pédagogique de l’enseignant documentaliste et cherche à orienter celui-ci vers un statut de technicien de la documentation. C’est ainsi que la profession est du moins amenée à le ressentir, ainsi que l’indique une dernière enquête s’intéressant aux « revendications pédagogiques », menée en novembre 2007 par le groupe Documentation du SNES9 [SNES, 2007]. Sur les 626 professeurs documentalistes qui ont répondu, pas moins de 91,84% s’estiment « prêts à évaluer les connaissances et les compétences des élèves en Information-documentation ». Parmi ceux-ci, 44,4% pensent même devoir le faire en dehors de collaborations disciplinaires.

Cette forte adhésion n’empêche pas pour autant que soient vivement débattues, à l’interne, des applications concrètes de l’évaluation des élèves, des méthodes à utiliser et, surtout, des limites à ne pas franchir. Car tout est là : quelles formes doit prendre l’évaluation et jusqu’où aller, ou ne pas aller, pour se démarquer des professeurs de disciplines ?

4.1. Des représentations sur l’évaluation des élèves

Là encore, il s’avère que les représentations sur l’évaluation découlent de celles observées dans la critique de la pédagogie qualifiée de traditionnelle. Si les limites à ne pas franchir semblent repérables concrètement, car indexées au « jeu scolaire » (notation des travaux, saisie du bulletin de notes et présence aux conseils de classe), il reste à en comprendre les véritables raisons.

L’École nouvelle a très tôt condamné le modèle normatif de l’évaluation en tant qu’instrument de reproduction et de sélection sociales et d’encouragement à l’esprit de compétition. De manière complémentaire, il n’échappera à personne que l’évaluation est également comprise comme synonyme de notation. La finalité de celle-ci étant la ségrégation, et non l’égalité des chances, le contrôle des connaissances est tout entier saisi comme un contrôle s’exerçant sur les personnes. Pire encore, le contrôle des personnes s’effectuerait au moyen du contrôle des connaissances, assurant ainsi la reproduction sociale. Évaluer, c’est alors hiérarchiser des personnes. C’est encore les conformer à des normes sociales déterminées sans tenir compte des formidables richesses des enfants. D’un point de vue puérocentrique cette fois-ci, basé sur les premiers travaux de la psychologie de l’enfant, l’école devrait au contraire accompagner le développement naturel de celui-ci, en lui évitant le poids d’un déterminisme social trop lourd. Plutôt que de ramener les performances des élèves aux critères du maître, il s’agirait alors de seconder les compétences potentielles de l’élève pour lui permettre d’aller jusqu’au bout de son développement.

C’est en substance ce que semble signifier l’enseignant documentaliste, héritier des promoteurs de cette « autre » école, lorsqu’il refuse de rentrer dans ce « système » de notation, ou même d’évaluation trop techniciste. Ne pas se laisser « enfermer par la note10 » pour se laisser libre de cultiver une certaine liberté pédagogique, un « faire autrement » que résume bien le leitmotiv de l’alternative pédagogique. Cette alternative, inscrite dans le triptyque du « lieu autre, méthodes autres, enseignant autre », se traduit par des postures relationnelles souvent revendiquées comme une aide sous forme de conseil apporté à l’élève au gré de ses demandes. Se retrouvent alors les principes de la non-directivité inspirés de Carl Rogers (1976). Cette démarche, toujours par opposition au modèle traditionnel privilégiant la fonction sommative, en appelle pourtant, mais faussement, à la fonction formative. Faussement parce qu’elle n’est alors que rarement fondée sur une appréciation formalisée de critères précis qui seraient fournis aux élèves. Mais force est aussi de constater, comme le rappelle la récente enquête du SNES, la demande de la profession en terme d’expertise de l’évaluation des apprentissages.

Entre ces deux pôles, tenus d’un côté par le jeu scolaire et la contrainte institutionnelle, et de l’autre, par le libre arbitrage de l’élève et la mise en retrait de l’enseignant, il existe bien évidemment de nombreuses postures intermédiaires. Cependant, leur variété permet difficilement de nouer l’identité professionnelle sur une base commune. Un paradoxe semble dès lors apparaître qui joue de la tension entre, d’une part, le souci déclaré d’évaluer les savoirs documentaires, souci également manifesté par l’expression d’un besoin de rationalisation des critères d’évaluation et de techniques d’évaluation et, d’autre part, le refus d’un enfermement disciplinaire auquel ces intentions pourraient conduire.

4.2. Évaluer, c’est enseigner

Si la question de l’évaluation intéresse tant les professeurs documentalistes, c’est bien parce qu’ils se sentent enseignants. Comment pourrait-on d’ailleurs dissocier l’enseignement de l’évaluation ? Trois raisons viennent aussitôt à l’esprit.

4.2.1. Réguler l’apprentissage, réguler l’enseignement

La première est de l’ordre de l’efficacité. Pragmatique, l’évaluation s’intéresse à ce qui réussit. On évalue ici principalement pour obtenir des informations en retour de son action pédagogique. Ces rétroactions profitent autant à l’élève, qui prend alors conscience de son apprentissage, de ses réussites et de ses difficultés, qu’à l’enseignant qui, rapportant les résultats enregistrés aux moyens et aux méthodes mis en œuvre pour les obtenir, va pouvoir améliorer son cours. Dans l’un et l’autre cas, l’évaluation permet la régulation, celle de l’apprentissage autant que celle de l’enseignement. L’enjeu est ici principalement éducatif et vise l’optimisation de la transmission des savoirs. La fonction de l’évaluation sera alors plutôt formative - ou formatrice dans certains cas – puisque axée sur la formation de l’élève. Dès lors, tout enseignant documentaliste engagé dans une séquence didactique, i.e. d’enseignement-apprentissage, ne peut pas ne pas se donner les moyens d’évaluer les fruits de celle-ci. Afin de se construire un regard le plus objectif possible, il a recours à des outils critériés qu’il peut partager avec ses élèves. Sans cela, sans acte évaluatif raisonné, l’enseignant serait voué à s’illusionner, autant sur l’efficacité de son action que sur la valeur de celle-ci. Mais surtout, il manquerait à son devoir.

4.2.2. Permettre l’intégration sociale

C’est ainsi que la seconde raison est de l’ordre de la responsabilité pédagogique, laquelle est inscrite dans le code déontologique du professeur dans le secondaire11. L’évaluation doit être ici considérée comme un acte social d’éducation marqué par une interaction forte entre l’élève, la société et l’école. De même que l’élève a besoin de l’école pour attester d’acquisitions qui vont lui permettre son insertion dans la société, la société réclame de l’école qu’elle certifie les connaissances et les compétences dont elle a besoin pour assurer son développement. L’école, de son côté, se porte garante de ces acquis : l’attestation scolaire (brevet des collèges, BEP, bac, bac professionnel) certifie bien à la société que l’élève a atteint un certain niveau de compétences et de connaissances qu’il est en droit de faire valoir. L’évaluation, surtout lorsqu’elle est un acte institutionnel, révèle ici son enjeu social. Sous cet angle, ne pas évaluer reviendrait à priver l’élève de la reconnaissance sociale dont il a besoin pour passer de l’école au monde professionnel et social. Comment, dès lors, un enseignant pourrait-il se soustraire à cette nécessité sans se départir de sa responsabilité ? Cette analyse ne serait cependant complète que si la question des connaissances à faire valoir était résolue, point sur lequel il nous faudra revenir s’agissant notamment de l’information documentation.

4.2.3. Rationaliser des attentes

Cependant, pour apporter la garantie indispensable à cette fonction attestative de l’évaluation, il importe que l’enseignant dispose d’outils pertinents, les plus objectifs possibles – sachant qu’en matière d’évaluation il ne saurait y avoir d’objectivité absolue – et en cohérence avec les contenus proposés et les niveaux des élèves concernés. L’évaluation permet en ce sens une rationalisation et un partage des critères permettant d’établir le niveau des acquisitions. La rationalisation favorise chez l’enseignant la construction d’un regard critique sur son action, et permet de partager les attentes de celle-ci avec les élèves, dans le cadre d’une évaluation formative, afin de les inclure dans le processus. Ce type d’évaluation, formel, s’oppose ainsi nettement aux types d’information informels (conseil, guidage) rencontrés précédemment et qui ne permettent ni d’apporter des informations en retour, ni de faire intégrer les critères de réussite par les élèves, condition essentielle de leur future autonomie.

Le professeur documentaliste semblerait tout avoir à gagner à considérer à son tour l’évaluation comme la signature de l’acte d’enseigner, et cela pour les trois raisons que nous venons d’exposer. La première est qu’en objectivant et en formalisant ses attentes, il aide l’élève à se représenter, à adhérer et à rejoindre celles-ci en terme d’apprentissage. Par la même occasion, l’enseignant documentaliste se donne les moyens de parfaire son expertise pédagogique en tirant les « leçons » des évaluations. La seconde raison est que, par ce processus de rationalisation et d’approfondissement de ses pratiques, il contribue à la professionnalisation du corps et par conséquent, à la reconnaissance à laquelle il aspire. La troisième raison est son adhésion à l’une des missions essentielles de l’école en matière d’attestation des connaissances acquises. Ce faisant, il conforterait son affiliation au corps professoral par le partage d’une éthique et d’une responsabilité pédagogique assumées.

4.3. Valeur de l’évaluation

4.3.1. La question de la valeur de ce qui est enseigné

La première question qui se pose au didacticien se penchant sur les contenus d’enseignement comme à l’enseignant documentaliste considérant son action pédagogique pourrait bien être : ces savoirs valent-ils d’être appris par les élèves ? C’est bien là une question essentielle puisqu’elle pose celle de la présence de l’élève et de l’enseignant dans leur relation aux savoirs scolaires. Le principe de base étant que n’est évalué que ce qui a de la valeur, l’élève est toujours fondé à penser que seuls les contenus d’apprentissage qui sont évalués ont une certaine valeur. D’où la question que certains posent au début d’une séquence : « est-ce que c’est évalué ? »

4.3.2. L’origine institutionnelle de la valeur

Pourtant, la valeur attachée à un enseignement ne tient pas de ses contenus, mais de la raison sociale de ceux-ci. Des choix sont opérés qui expliquent par exemple le poids relatif de certaines disciplines par rapport à d’autres. La valeur ajoutée, sous forme de coefficient, à certaines matières au brevet ou au bac rappelle assez la prégnance de nécessités sociales conjoncturelles, ainsi que des adhérences venues du passé, mais l’une et l’autre porteuses d’une certaine vision de l’avenir de la société. La valeur n’est donc pas intrinsèque à la discipline mais lui est attachée par l’institution. Les parents s’en font l’écho dans les choix qu’ils font pour leurs enfants et dans l’écoute sélective qu’ils montrent auprès de certains professeurs, répercutant une hiérarchie rarement remise en question. Ainsi la valeur descend-elle, comme par capillarité, au travers de la discipline, imprégnant au passage le professeur qui l’enseigne et l’élève qui en est le réceptacle et le bénéficiaire. A ce titre, l’évaluation sert bien à mesurer la « plus-value », ce plus de valeur obtenue dans l’écart réalisé entre le début et la fin de la séquence d’enseignement-apprentissage. Du coup, un « fort »12 en telle discipline, pour utiliser l’étymologie commune aux termes évaluation et valeur, est celui qui a su profiter de la valeur transmise par celle-ci. C’est bien cette valeur acquise au terme d’un apprentissage que l’école a pour mission d’attester, i.e. de faire valoir dans la société, à des fins d’intégration.

4.3.3. De la valeur de l’Information-documentation

A cette aune, que dire de la valeur de l’Information-documentation ? On peut très bien penser que puisqu’elle ne compte pas, ou peu, en tant que telle dans la certification sociale, c’est qu’elle n’a que peu de valeur, du moins autrement que dans les discours emphatiques de politique éducative. Le fait est qu’à l’échelle de l’établissement scolaire, la cote de l’Information-documentation ne vaut pas grand chose ! N’étant pas estimée, et donc estimable, à quoi servirait-il de chercher à l’évaluer chez les élèves ? Pour ajouter à ce raisonnement, prenons acte que la profession s’estime non reconnue par l’institution, et s’en trouve par conséquent dévalorisée. Il est ainsi possible d’interpréter ce besoin de reconnaissance, manifesté tant auprès de la direction, que des collègues de discipline et des élèves eux-mêmes, comme une quête d’estime et de valeur. Est-il dès lors possible d’envisager de retourner ce triste sort en jouant de cette notion de valeur ?

4.3.4. Comment produire de la valeur ?

Qu’elle soit valeur des contenus enseignés, valeur de l’enseignement ou valeur du corps d’enseignement, lutter pour faire reconnaître cette valeur est nécessaire, mais ne saurait suffire. Il faut encore et surtout la produire. Si nous inversons le raisonnement présenté précédemment, nous tiendrons que c’est à partir de l’évaluation qu’il faudrait commencer, au motif que c’est cet acte qui désigne la valeur, au lieu d’en être la mesure. Fondée sur une rationalisation des attentes de l’enseignement, elle concourt à structurer et à rendre visibles les apprentissages réalisés. Ainsi est-ce en évaluant de manière professionnelle que l’on donnera de la valeur à ce que l’on enseigne.

Mais la reconnaissance, nous l’avons vu, doit être encore sociale. Il est absolument nécessaire que les apprentissages concernés puissent être pris en compte dans les attestations nationales, comme le brevet des collèges et le bac. La réforme en cours du premier permet à présent d’intégrer par le contrôle continu toutes les disciplines et par conséquent toutes les notes obtenues en classe de 3ème13. C’est peut-être là une chance à saisir pour l’Information-documentation. Le second intègre déjà, pour une faible part mais qui gagnerait à être mise en valeur, les apprentissages documentaires réalisés dans les TPE en classe de 1ère. Un pas décisif resterait donc à franchir qui est la publicisation de l’évaluation. Celle-ci ne peut se satisfaire de la fonction formative, dont les enjeux sont strictement pédagogiques. L’enjeu social, pour sa part, nécessite un transfert du résultat de l’évaluation vers l’institution scolaire. La notation, passage obligé aujourd’hui de cette transmission, est encadrée par deux processus, l’un d’objectivation, l’autre de publicisation. Le premier est un processus de traduction chiffrée de la mesure effectuée, tandis que le second est un processus de publicisation et de validation institutionnelle. Participant à l’intégration socio-professionnelle de l’élève, l’Information-documentation gagnerait ainsi sa place au rang des enseignements institués. C’est en rendant publique l’évaluation et en lui donnant une fonction attestative qu’on donnera de la valeur à ce que l’on enseigne.

L’élaboration des contenus d’enseignement, ouverte par le chantier didactique en cours, s’inscrit dans cette perspective de valorisation de la profession. Ce seront ces objets qui, in fine, deviendront les vecteurs de cette valeur. Il est visible aujourd’hui que ces savoirs scolaires sont déniés par l’institution, comme est déniée, au travers notamment de l’évaluation, la valeur de la mission pédagogique des professeurs documentalistes. Les deux vont de pair et doivent être précisés et défendus en même temps. Le projet curriculaire intègre d’ailleurs la définition des savoirs et les conditions de leur évaluation de manière complémentaire. L’évaluation, signature de l’enseignant, est aussi créatrice de valeur et levier d’insertion sociale

En conclusion : sortir d’une posture de simple alternative pédagogique

Nous avons tenté, au travers du repérage de ces quelques représentations primordiales, de dégager un triple refus : le refus de la constitution d’une discipline, le refus d’enseigner des connaissances déclaratives et le refus de l’évaluation des apprentissages. Nous avons pu observer combien ils étaient attachés à une construction identitaire héritée de l’Éducation nouvelle et, par la même, en opposition radicale à une vision sclérosée, stéréotypée de l’école dite traditionnelle. A l’opposé, et cette fois-ci de manière positive, nous avons remarqué que cette identité professionnelle s’incarnait dans un modèle se présentant lui-même comme alternatif (« on enseigne, oui, mais autrement »). Largement valorisé par l’institution elle-même dans les années 70, ce modèle a pourtant été par la suite évacué en marge, à l’instar de cette pédagogie « du détour » qu’il animait et dont les avatars IDD et TPE subsistent aujourd’hui à l’état résiduel. D’alternative pédagogique, le grand souffle de la rénovation de l’école est passé à l’état d’alibi pédagogique. Comment, en effet, croire que des doses homéopathiques de dispositifs innovants pourraient infléchir l’entreprise École ? De même, et puisqu’il s’agit du même mouvement, comment s’imaginer aujourd’hui que le CDI pourrait encore participer à construire une autre école ? Par ce triple refus, s’il n’est conjuré à temps par une réflexion rationnelle que nous appelons de nos vœux, faudrait-il faire le deuil de l’espoir que la profession nourrit cependant quand elle estime devoir « discipliner l’esprit » des élèves à la pensée critique, devoir leur offrir des savoirs opératoires et devoir construire sa propre valeur ?

Et pourtant, élaborer une discipline nouvelle, ce n’est pas rompre avec un passé qu’il faudrait renier mais plutôt apprendre à assumer un héritage important, spécifique d’une identité originale, pour le valoriser et le transformer, tout en tenant compte des apports des Sciences de l’éducation et des enjeux contemporains. La Documentation, « discipline nouvelle », pour reprendre une expression qui a tout juste, et déjà 30 ans [FADBEN, 1978], doit acter le fait que le monde et l’école ont évolué et par là-même ne plus se cantonner dans un non-dit protégé par le label « alternatif ». Elle doit au contraire trouver des voies et des expressions inédites, mais en pleine lumière, à l’image de ce qu’elle peut apporter de fort et d’essentiel au sein de l’école, et pour l’école.

Si, ainsi que l’a affirmé Jean-Pierre Astolfi [2007] à l’université d’été « De l’information à la connaissance » en 2006, il est important de distinguer enseignement et discipline, il est tout autant nécessaire de faire coexister des moments d’immersion disciplinaire et des « moments décrochés où l’on revient sur les procédures, où l’on nomme les choses ». Ce sont justement ces moments d’enseignement-apprentissage que prend en charge la réflexion didactique. Il s’agit bien de faire alterner des séquences de co-disciplinarité, où le savoir se concrétise et devient opératoire, et des séquences disciplinaires en Information-documentation où le savoir devient abstraction et se structure. Car, comme conclut d’ailleurs le didacticien, « chaque contenu d’enseignement a besoin d’une discipline pour prendre en charge sa structuration ».

Objet construit, produit culturel et social, cadre institutionnalisé d’enseignement, matrice épistémologique, la discipline est encore, et peut-être surtout, le vecteur éducatif d’une certaine vision de l’homme. Elle est l’expression concrète et ordonnée du discours axiologique de l’École. L’Information-documentation, lorsqu’elle travaille un objet aussi spécifique et aussi essentiel qu’est l’information, lorsqu’elle axe ses ambitions, empreintes de laïcité, sur l’éducation d’un homme libre sachant s’émanciper des influences de toutes sortes que véhicule le monde déréglé de l’information, peut prétendre à devenir une discipline scolaire et à honorer les moyens horaires et humains qui, corrélativement, lui reviendraient alors en propre.

Que les difficiles conditions matérielles dans lesquelles évoluent les professeurs documentalistes aujourd’hui ne rabaissent pas leurs légitimes exigences. Car penser ardemment l’avenir, écrit Alain Kerlan, c’est « refuser de s’incliner devant ce qui est ».

DOCUMENTOGRAPHIE

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  1. Le terme fonction vient du lat. juridique « service public, office », dérivé de fungi « s’acquitter de, accomplir » [Rey, 1995 ]. 

  2. Heidegger M. Essais et conférences. Gallimard, 1958. Cité par Mabilon-Bonfils et Saadoun, 1997 

  3. « Et sur les indications du diable, on créa l’école. L’enfant aime la nature : on le parqua dans des salles closes. L’enfant aime voir son activité servir à quelque chose : on fit en sorte qu’elle n’eût aucun but. Il aime bouger : on l’obligea à se tenir immobile. Il aime manier les objets : on le mit en contact avec les idées. Il aime se servir de ses mains : on ne mit en jeu que son cerveau. Il aime parler : on le contraignit au silence. Il voudrait raisonner : on le fit mémoriser. Il voudrait chercher la science : on la lui servit toute faite. Il voudrait s’enthousiasmer : on inventa les punitions. (…) Alors les enfants apprirent ce qu’ils n’auraient jamais appris sans cela. Ils surent dissimuler, ils surent tricher, ils surent mentir. » 

  4. CRAP-Cahiers pédagogiques 

  5. http://www.gfen.asso.fr/index.htm 

  6. Si l’adjectif déclaratif est bien un déverbal de déclarer, lequel s’apparente sémantiquement à professer, il appartient cependant à la famille étymologique de clarifier, au sens de "rendre plus clair, plus lumineux", d’où "élucider". Par conséquent, une connaissance déclarative est une connaissance qui a pour fonction d’éclairer. 

  7. Rappelons que pour J.-P. Astolfi, les savoirs scolaires ne sont ni théoriques ni pratiques, mais de nature propositionnelle : ils se présentent sous forme de propositions logiquement connectées épistémologiquement, mais sans aucun sens pour l’élève, se contentant d’énoncer des contenus [Astolfi, 1992]. 

  8. Cité par Langlade, 1997. p. 10-11 

  9. SNES. 62,50% des questionnaires renseignés l’ont été par des personnels syndiqués. 

  10. Lu sur la liste enseignant documentaliste (E-doc) en mars 2008. 

  11. M.E.N. Mission du professeur exerçant en collège, en lycée d’enseignement général et technologique ou en lycée professionnel. Circulaire n°97-123 du 23 mai 1997. Le B.O. n°22, 29 mai 1997 

  12. Le mot évaluation est construit à partir de l’étymon indo-européen wal- dont l’une des acceptions est « rendre fort ». Évaluer une production d’élève, c’est bien repérer ce qu’il y a de « fort » dans cette production et, au travers d’elle, reconnaître la « valeur » de son auteur. La famille lexicale est large en français : valeur, valeureux, valorisation, valide, validation, validité, invalidité, évaluer, dévaluer, etc. 

  13. M.E.N. Modalités d’attribution du diplôme national du brevet. Arrêté du 01-06-2006. Le B.O. n°26 du 29 juin 2006. http://www.education.gouv.fr/bo/2006/26/MENE0601428A.htm 


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