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Mythologie documentaire et informationnelle, un passage obligé pour l’entreprise didactique ?

L'entreprise didactique ne peut fonder son succès sur les seules pistes scientifiques et épistémologiques. Le propos de cet article est de mettre en place parallèlement un projet mythologique.

    Le projet didactique en documentation cherche avant tout à apporter de la rigueur à une discipline afin que les savoirs enseignés comprennent une forme de légitimité scientifique notamment parce que le travail de recherche implique critiques et reformulations qui garantissent la pérennité et l’efficacité des notions qui seront transmises aux élèves. Mais notre propos n’est pas de s’attarder sur cette entreprise à laquelle nous tentons de participer et qui connaît de grandes avancées grâce aux travaux de Pascal Duplessis. Peut-être y trouvera-t-il sa place un jour au panthéon de la documentation car c’est bien de cela dont je veux parler.

    Faut-il développer en parallèle une mythologie documentaire ? Après tout l’histoire des sciences n’est pas que rigueur absolue et les travaux de Bruno Latour ont montré que le succès des théories scientifiques tient également à d’autres processus communicationnels que ceux de la pure vérité scientifique. Alors quid des grands mythes documentaires, des héros (et héraults) de la documentation si tant est qu’on ne puisse les faire accéder désormais au panthéon de la documentation ? Lorsqu’on évoque le territoire de la documentation, il faut convenir que des noms surgissent de manière évidente et que ces noms sont autant de territoires de partage avec les mondes des sciences de l’information et des bibliothèques.

    Nous songeons ici bien sûr à Paul Otlet et Henri Lafontaine mais également de Melvil Dewey ou bien encore de Suzanne Briet. Force est de constater ici que la francophonie est bien représentée dans le domaine mais les visions et desseins de la documentation ont toujours été internationaux voire supranationaux. Ces pionniers de la documentation ont permis à cette dernière d’acquérir une rigueur et des méthodes qui sont encore utilisées aujourd’hui. Ils ont répondu à la première exigence, celle du classement, celle de la prise en compte du document.

    Ils ont ouvert quelque peu ce passage du documentum au monumentum dans la mesure où les classifications ont permis le développement des grandes bibliothèques et des lieux de savoirs. En ce sens, la documentation répond doublement aux exigences scientifiques des classements, en étant à la fois matière à classement et en étant la discipline reine de la division et des regroupements scientifiques. Seulement il semble qu’elle se soit plus occupée des autres que d’elle-même et que ces concepts n’ont pas encore été clairement définis à la fois scientifiquement et pédagogiquement.

    Mais les travaux en la matière avancent et l’objectif est de parvenir à concilier les deux aspects du mot document qui nous sont indiqués par son étymologie : le premier impliquant la notion de preuve, et le second la notion d’apprentissage, de transmission, d’éducation (et donc de didactique…)

    En l’occurrence, la fabrique de la mythologie documentaire et le succès de son entreprise scientifique et didactique nous semblent liés. Il nous faut donc construire les mythes documentaires et rappeler la dimension éducative du document et rattacher à la démarche didactique les nombreux héritages documentaires. Sheila Webber et Bill Johnston ont fait de Vannevar Bush est un des référents historiques de l’information literacy. Après tout pourquoi pas dans la mesure où cela lie l’information documentation aux évolutions techniques et aux nouveaux enjeux comme l’infopollution, la surinformation, les changements de paradigmes du web 2.0. Nous avons également démontré qu’il faut être prudent également en la matière Michel Foucault notamment dans l’archéologie du savoir nous met en garde contre les préséances scientifiques et les fausses ressemblances. Mais rien n’empêche de chercher des filiations et des références chez les scientifiques qui ont travaillé sur les notions d’information ou de document. Ce projet mythologique cependant doit être distingué, tout en étant complémentaire, des recherches sur l’histoire de la notion d’information et des supports d’information constituant le volet épistémologique.

    L’information documentation a certes un héritage mais elle possède également un avenir et doit répondre à la question du présent en tentant d’échapper à l’âge de la vitesse qui a jusque là poussé à l’usage d’outils dans une optique d’adaptation. Toutes ces évolutions conduisent à construire le projet d’une culture de l’information et de la communication comprenant une dimension technique. Nous retrouvons une nouvelle fois la dimension mythologique : la figure d’Hermès Trismégiste peut alors résumer cette ambition mêlant trois visages : celui de l’information, celui de la communication et celui de la technique - figure idéale pour représenter la 71ème section française des sciences de l’information et de la communication- La documentation parait parfaitement s’intégrer à ce dispositif en mêlant techniques documentaires, produits documentaires et systèmes relationnels et autres hypomnemata supports d’informations. La documentation dans sa double acception de preuve et de transmission est cette muse qui permet d’ajouter le petit plus qui fait que l’information devient savoir. Voilà qui explique également les proximités et les collaborations qui existent entre les sciences de l’éducation et les sciences de l’information et de la communication.

    Or comment une discipline qui fait tant pour le savoir et sa transmission ne pourrait être enseignée ?