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Webfinder: le nez dans le moteur

Florian Reynaud présente et met à la disposition de tous sur son site « prof' doc' » un outil de simulation de moteur de recherche qu'il a lui même créé. Cet outil nous semble extrêmement intéressant et devrait séduire bon nombre de professeur.e.s documentalistes. C'est la raison pour laquelle nous lui consacrons cet article.

Webfinder https://pixabay.com/fr/seo-optimisation-moteur-de-recherche-1108457/

Introduction

Le moteur de recherche est un outil utilisé quotidiennement par les élèves. Cependant, son fonctionnement reste souvent méconnu de ces derniers. Enseigner la notion moteur de recherche en dépassant le niveau procédural de la simple utilisation pour tendre vers une compréhension de son fonctionnement et des enjeux qui lui sont rattachés s'avère pourtant aujourd'hui plus que nécessaire, d'autant plus que les représentations des élèves liées à cet outil sont fortes et font obstacle sur le chemin du recul critique que souhaite leur faire emprunter le professeur documentaliste.

Cette question des représentations autour du moteur de recherche n'est plus à démontrer. Citons par exemple Anne Cordier, Maître de conférences en SIC à l'ESPE de Rouen, et son ouvrage Grandir Connectés1 dans lequel elle s'intéresse aux pratiques des adolescents en matière de recherche d'information sur Internet et met au jour certaines de leurs représentations (voir aussi la thèse de doctorat d'Anne Cordier consacrée à cette question2) ou encore Karine Aillerie, Docteure en SIC, qui consacre également une partie de sa thèse de doctorat à ce sujet3. Enfin, plus modestement, nous renvoyons à notre mémoire de Master 2 dans lequel nous nous sommes tout particulièrement intéressés aux représentations des élèves concernant la notion moteur de recherche4 (un article synthétique de ce travail est disponible sur Les Trois couronnes5).

Du côté de l'enseignement de l'information-documentation, la prise en charge de la notion moteur de recherche par les professeur.e.s documentalistes est bien réelle. Une analyse approfondie de plus de 450 fiches pédagogiques publiées sur le Web menée par Pascal Duplessis montre en effet que cette notion est la huitième des dix thématiques mobilisées par les professeur.e.s documentalistes lorsqu'ils font cours6. Pour finir de se convaincre, il suffit de consulter les nombreuses fiches pédagogiques disponibles en ligne et qui sont consacrées uniquement à l'enseignement de cette notion7.

Cependant, si certaines des représentations des élèves à propos de la notion moteur de recherche sont connues et si de nombreux professeur.e.s documentalistes enseignent cette notion, mettre en place des séances d'enseignement-apprentissage qui permettent aux élèves de faire évoluer leurs conceptions n'est pas toujours chose aisée. Généralement, lors de ces séances, les élèves sont amenés à manipuler un moteur en expérimentant différentes requêtes autour d'un même sujet, à observer et à analyser une page de résultats pour essayer de comprendre, par exemple, comment ceux-ci sont classés, ou encore à se documenter pour découvrir le fonctionnement d'un moteur ou pour mieux connaître l'entreprise à laquelle il appartient et le mode de financement de celle-ci. Toutefois, il peut s'avérer compliqué pour les élèves de réellement assimiler ce qui se passe dans la partie invisible d'un moteur, c'est-à-dire de percevoir le lien qui existe entre la requête et la base de données, la façon dont le moteur indexe les pages web et la façon dont il va classer les résultats. Cela obligerait notamment à s'intéresser à l'algorithme de classement, une notion plutôt abstraite pour des collégiens. Comment alors rendre plus visibles et plus concrets les effets d'un algorithme sur le classement des résultats selon que l'on mette en avant tel ou tel critère afin de permettre aux élèves de mieux appréhender le fonctionnement d'un moteur?

Florian Reynaud, professeur documentaliste dans l'Académie de Lyon, a créé à cet effet un outil de simulation, Webfinder, qu'il met librement à disposition de tous sur son site prof' doc'. Nous souhaitons ici promouvoir cet outil à travers une présentation de son interface, de son utilisation et de son originalité. Nous ferons le lien entre l'outil et son utilisation pédagogique en regardant notamment la proposition faite par Florian Reynaud tout en apportant un regard critique accompagné de pistes de réflexion ou de propositions de prolongements possibles.

1. Présentation de Webfinder

Webfinder est un mini-site web constitué de 11 pages. Cet outil a été créé par Florian Reynaud le 15 février 2016 et a depuis connu plusieurs versions. A l'heure où nous écrivons, Webfinder en est à la version 1.6, ce qui signifie que de nombreuses corrections et améliorations ont été apportées depuis la création de l'outil8. Cela montre surtout que l'outil n'a pas été envisagé de façon figée et que son auteur continue de réfléchir à une optimisation de Webfinder en intégrant de nouvelles données au fur et à mesure de ses expérimentations avec ses élèves. Il effectue donc régulièrement une auto-critique de son outil (tant sur le plan technique que sur le plan théorique) et s'interroge sur sa pratique. Enfin, et pour conclure cette courte présentation de Webfinder, il est utile de savoir que cet outil est accessible et utilisable directement en ligne sur le site de Florian Reynaud mais qu'il est également possible de le télécharger, de l'héberger ailleurs et d'y apporter des améliorations9.

1.1. L'interface

Les deux premières page de Webfinder servent à présenter le projet. Celles-ci nous plongent dans le contexte en nous propulsant aux origines d'un Web ne contenant que dix pages. Un aperçu des dix pages web recensées par le moteur est d'ailleurs proposé. Ces dix pages correspondent à de réelles pages web et non à des pages factices créées par l'auteur pour l'occasion. Un symbole rond avec une flèche en son centre, de taille nettement visible située en bas de chaque page, permet de naviguer de façon linéaire (une page après l'autre) dans le mini-site avec parfois un retour en arrière possible.

Arrivés sur la troisième page, nous nous retrouvons véritablement sur l'interface de la simulation du moteur. Une barre de requête est disponible en haut de l'écran et un symbole représentant une loupe est placé à côté de celle-ci et permet de valider les requêtes. L'utilisateur n'est donc pas perdu et trouve vite ses repères. La base de données du moteur est également visible sur la même page. Elle se présente sous la forme d'un tableau composé de cinq colonnes et d'une ligne par page web répertoriée. La première colonne indique le titre de la page web, la deuxième l'adresse URL, la troisième le texte contenu dans le corps de la page web, la quatrième le nombre de liens pointant vers la page et enfin la cinquième le nombre de visites sur la page (le nombre donné de visites n'est pas réel). Il est possible de trier par colonne en cliquant sur le titre des colonnes. Les colonnes se classent alors soit par ordre alphabétique ou alphabétique inversé (pour les colonnes "titre", "URL", "texte"), soit par ordre de grandeur croissant ou décroissant (pour les colonnes "nombre de liens", "nombre de visites").

Webfinder1 Image 1. L’interface de Webfinder : la base de données et la barre de requête.

Les dix pages web recensées par le moteur traitent toutes de la digestion et seules les requêtes autour du lemme "digestion" (digestion, digérer, digestif...) aboutissent. A la suite d'une requête formulée dans la barre de recherche, l'utilisateur voit apparaître à gauche de l'écran le classement des résultats sous la forme d'une page de résultats (proche de celle proposée par le moteur Google) tandis que la base de données reste affichée sur la droite de l'écran. Les liens affichés sur la partie dédiée à la page de résultats sont tous fonctionnels et renvoient vers les pages web indiquées. Des questions sont régulièrement posées à l'élève pour l'inciter à observer le classement des résultats et essayer d'établir une corrélation entre celui-ci et la base de données. Un espace de réponse est prévu à cet effet. Des explications simples, concises et précises sont ensuite apportées. Au cours de l'expérience, l'élève va être amené à formuler les trois mêmes requêtes mais ces dernières vont être traitées à l'aide de trois algorithmes différents.

Webfinder2 Image 2. L’interface de Webfinder : l’affichage des résultats, la base de données et l’espace de réponse.

La dernière page de la simulation offre un récapitulatif du classement des résultats obtenus par ces trois algorithmes.

Webfinder3 Image 3. L’interface de Webfinder : le comparatif des trois pages de résultats.

1.2. Fonctionnement

L'outil de simulation Webfinder évolue dans un Web constitué de dix pages traitant toutes de la digestion. Les élèves sont amenés à suivre comment John Smith, le concepteur supposé de ce moteur de recherche, va peu à peu le complexifier. Ils vont d'abord consulter la base de données du moteur avant d'être invités à effectuer une recherche autour de la digestion grâce à la barre de requête disponible. Rappelons que seules les requêtes autour du lemme "digestion" (digestion, digérer, digestif...) aboutissent et que celles-ci donnent lieu au même classement des résultats. Les élèves ne peuvent donc pas se disperser. Ils vont tous travailler autour des mêmes matériaux, être confrontés aux mêmes questionnements et aboutir aux mêmes constats, ce qui s'avère, dans ce cas, bien pratique pour l'enseignant dont l'objectif est ici, rappelons le, de soulever le capot du moteur et de mettre les élèves face à du concret.

Suite à la recherche effectuée apparaît à gauche de l'écran le classement des résultats tandis que la base de données reste affichée sur la droite de l'écran, ce qui permet aux élèves de manipuler les colonnes afin d'essayer d'identifier le critère principal sur lequel s'est appuyé le moteur pour classer les dix pages web disponibles. Toutefois, une mystérieuse colonne sans titre est apparue dans la base de données et le classement des résultats semble dépendre de celle-ci. Les élèves découvrent alors le premier critère utilisé, celui de pertinence, qui s'appuie sur le nombre de mots du lemme "digestion" (les chiffres de la mystérieuse colonne renvoient effectivement au nombre de mots du lemme "digestion" présents dans le texte de chaque page web. La page web en contenant le plus arrive en première sur la page de résultats, et ainsi de suite).

Mais ce seul critère ne suffit pas à John Smith et il décide d'améliorer son moteur en incluant un nouveau critère. Les élèves effectuent alors une deuxième recherche et constatent aussitôt que le classement des pages diffère des résultats issus de la première recherche. Ils constatent également l'apparition de trois nouvelles colonnes dans la base de données, intitulées "score pour les visites", "score pour les mots" et "pagerank". Le moteur attribue cette fois des points à chaque page en fonction du nombre de visites qu'elle reçoit et du nombre de mots du lemme contenu dans son texte puis il additionne les deux scores obtenus pour aboutir à un "pagerank" (artificiel dans le cas de cette simulation) qui lui permet de classer les pages selon deux critères: la pertinence ("score pour les mots") et la popularité ("score pour les visites"). Dans le cas où des pages obtiennent un score "pagerank" identique, le classement dépend alors du nombre de mot du lemme "digestion" contenu dans le texte.

John Smith souhaite à nouveau améliorer son moteur et pense qu'un troisième critère pourrait être pris en compte. Les élèves sont donc amenés à effectuer une troisième et dernière recherche. Ils constatent là aussi que le classement des résultats a changé et qu'une nouvelle colonne a fait son apparition dans la base de données : la colonne "score pour les liens". Des points sont attribués en fonction du nombre de liens pointant vers la page. Le score obtenu est additionné aux deux autres scores ("score pour les visites" et "score pour les mots") pour aboutir à un nouveau "pagerank". La page web obtenant le "pagerank" le plus élevé arrive en première sur la page de résultats. Ce troisième critère, basé sur le nombre de liens pointant vers une page web, est celui de notoriété. La simulation s'arrête ici, précisant que John Smith a ajouté de la publicité dans son moteur pour gagner de l'argent à chaque clic (le premier résultat apparaissant désormais sur la page de résultats renvoie vers un site commercial) et qu'il pourrait aller encore plus loin en enregistrant par exemple la navigation personnelle des internautes pour mieux savoir ce qui leur plaît. Pour finir, les élèves accèdent à une page récapitulative, présentant côte à côte les trois différentes pages de résultats issues des trois algorithmes différents.

2. En quoi consiste l'originalité ?

La première originalité de l'outil Webfinderest l'outil lui-même. En effet, il n'existe pas à notre connaissance un outil comparable spécialement pensé pour l'enseignement de l'information-documentation, à destination des professeur.e.s documentalistes et adapté aux élèves. Webfinder a le mérite d'exister et rien que pour cette raison, nous souhaitons en faire la promotion. Tout le monde n'a pas les compétences informatiques ou le temps de mettre au point un tel outil de simulation et nous remercions vivement Florian Reynaud pour le travail accompli et sa mise en partage.

Sur le plan pédagogique, Webfinder a été imaginé dans le but de rendre un peu plus visibles pour les élèves les critères qui régissent le fonctionnement d'un l'algorithme de classement avec la volonté affichée d'éviter le cours magistral et sa méthode expositive. Cet outil permet aussi de varier et de renouveler les tests de requête ou l'observation de pages de résultats généralement effectués par les élèves lors de séances info-documentaires dédiées à la notion moteur de recherche. Lors de ces séances, les élèves constatent des réalités mais ont souvent du mal à mesurer concrètement l'effet de tel ou tel critère sur le classement des résultats. Il leur est difficile de l'expérimenter et doivent la plupart du temps se contenter d'admettre ce que l'enseignant leur dit. Avec Webfinder, les élèves ont une chance de comprendre précisément en quoi consistent les critères de pertinence, popularité et notoriété et de voir concrètement leurs effets sur le classement des résultats affichés sur la page de résultats.

Une autre originalité réside dans le fait que la base de données soit directement accessible par les élèves. La lecture de celle-ci et sa compréhension nous semblent à la portée de collégiens et nous sommes convaincus que cela facilite pour eux l'appréhension de la notion base de données puis, plus tard, de celle de moteur de recherche. De plus, la conception de la simulation Webfinder et le cheminement qu'elle fait faire à l'élève à travers les différentes étapes qu'elle lui propose permet également d'aborder la notion d’algorithme de classement (ainsi que le cas particulier du PageRank), notion indispensable selon nous pour bien comprendre ce qu'est un moteur de recherche et son fonctionnement.

Enfin, d'un point de vue plus pragmatique, Webfinder est un outil de simulation réussi tant son utilisation et son fonctionnement sont proches de ceux d'un véritable moteur de recherche. Cela doit faciliter l'immersion des élèves dans la tâche.

3. Exemple d'utilisation pédagogique

Suite à ce que nous venons de dire, on imagine aisément l'intérêt pédagogique que peut avoir le professeur documentaliste à utiliser cet outil de simulation, d'autant plus que Webfinder doit pouvoir facilement s'intégrer dans des séances d'enseignement-apprentissage info-documentaire traitant de la notion moteur de recherche. Nous allons ici nous intéresser à la séquence proposée par Florian Reynaud et dans laquelle l'outil Webfinder est originellement utilisé. Cependant, nous nous contenterons simplement de présenter brièvement les objectifs et la progression de la séquence afin que le lecteur puisse avoir une vision d'ensemble du contexte dans lequel Webfinder a été pensé et utilisé.

La séquence s'intitule "5ème : du document au média" et est disponible en ligne sur le site prof' doc'. Elle s'adresse à des élèves de cinquième, dure cinq heures (cinq séances d'une heure) et est menée par le professeur documentaliste seul. Au cours de cette séquence, les élèves vont définir le document, l'information et le média en découvrant les étapes de conception et de fabrication du livre, le fonctionnement d'Internet et les étapes de conception d'une page web. La séance dans laquelle les élèves manipulent Webfinder pour comprendre le fonctionnement d'un moteur de recherche est la quatrième de la séquence. La cinquième et dernière séance correspond à une évaluation sommative10.

4. Analyse critique : pistes de réflexion et suggestions

Nous aimerions dans cette dernière partie apporter un regard critique et proposer des pistes de réflexion suite à la proposition pédagogique de Florian Reynaud. Il nous semble important de questionner certains aspects qui peuvent poser problème et qui mériteraient des éclaircissements. Nous allons nous focaliser sur ceux qui concernent l'outil de simulation et la séance traitant du moteur de recherche.

4.1. Tâche(s) de l'élève et notions abordées lors de la séance

Regardons de plus près l'outil de simulation Webfinder selon un angle pédagogique critique. Cet outil propose aux élèves une suite d'exercices, trois en l’occurrence, basés sur de l'observation, de la déduction et dans une moindre mesure, de la manipulation. Des questions jalonnent la progression de l'élève au sein de la simulation afin de l'inciter à réfléchir au fonctionnement d'un moteur de recherche. Une première remarque vient d'emblée : les trois exercices sont construits sur le même schéma (même si à chaque nouvelle question de nouveaux éléments viennent complexifier la réflexion) et cela pose la question de la redondance dans la tâche pour l'élève. De plus, rien ne garantit que les élèves arriveront à trouver les bonnes réponses aux questions qui leur sont posées et ce, pour deux raisons. La première est qu'il est possible d'accéder à l'étape suivante et donc, à la réponse explicative, sans avoir répondu à la question précédemment posée. Il suffit pour cela de cliquer sur l'icône représentant une flèche en bas de la page. La seconde est que même si l'élève essaie véritablement de trouver la réponse, il ne pourra pas la valider. En effet, l'espace de réponse prévu en haut de la page s'avère inopérant. On peut alors questionner l'utilité d'un tel espace. Nous émettons l'hypothèse que cet espace serve en fait à l'enseignant qui demande aux élèves d'y noter leur proposition de réponse puis de l’appeler afin qu'il valide ou invalide la réponse et les autorise ou non à passer à l'étape d'après.

Concernant les notions qui sont abordées au cours de la séance utilisant Webfinder, celles de moteur de recherche, d'algorithme de classement et de base de données sont pour nous les trois principales. Les notions base de données et moteur de recherche sont d'ailleurs bien mentionnées dans les notions visées par l'auteur dans sa présentation des objectifs de séquence. En revanche, celle d'algorithme n'apparaît pas et le terme même d'algorithme est absent des explications fournies aux élèves tout au long de la simulation. Il apparaît uniquement sur la dernière page de la simulation, celle résumant les trois classements issus de trois algorithmes différents. Nous suggérons donc à l'auteur d'intégrer la notion algorithme dans les objectifs notionnels visés et d'introduire le terme algorithme plus tôt dans la simulation.

Grâce à la base de données disponible dans la simulation, une sensibilisation au PageRank est envisagée. Même si certains chiffres sont factices (le nombre réel de visite sur les pages par exemple), la conversion en points des données puis la conversion en score de ces points doit être particulièrement éclairante pour les élèves. Nous avons cependant relevé de légères incohérences dans certaines conversions. Celles-ci ne portent pas à conséquences pour la compréhension du fonctionnement d'un moteur et d'un algorithme de classement en général mais pourraient tout de même peut-être s'avérer gênantes pour qui souhaiterait approfondir avec les élèves le fonctionnement du "pagerank" dans cet exemple particulier de Webfinder11. Enfin, nous voudrions faire une dernière remarque, qui relève plus d'une proposition d'amélioration, au sujet du calcul du "pagerank" de la simulation. Chacun des scores obtenus ("score pour les mots", "score pour les visites" et "score pour les liens") pèse de manière égale dans le calcul du "pagerank" (il suffit de les additionner tous les trois). Or, pourquoi ne pas imaginer attribuer des coefficients différents à chacun d'eux afin de privilégier tel ou tel ? Ainsi, le calcul du "pagerank" s'en trouverait certes complexifié mais plus proche de la réalité. Ce pourrait être une étape supplémentaire, à ajouter à l'exercice ou bien à développer pour un niveau supérieur destiné à des élèves de quatrième ou de troisième.

4.2. Acquisition des notions par les élèves

Pour clore cette partie, nous souhaitons nous intéresser au travail des élèves. Pendant la séance, ces derniers avancent pas à pas dans leur exploration du fonctionnement d'un moteur de recherche en observant particulièrement le fonctionnement de son algorithme. Cependant, même si des explications claires, concises et précises ponctuent régulièrement le travail des élèves, il nous paraît difficile de croire que ceux-ci puissent acquérir les objectifs notionnels visés (comprendre le fonctionnement d'un moteur de recherche, comprendre les notions algorithme et base de données). La première raison est le peu de temps (une heure) accordé ici par l'enseignant à ces sujets d'étude alors que, d'après nous, deux heures supplémentaires ne seraient pas de trop. La deuxième raison relève de la construction de la séance elle même. D'après le descriptif de la séance réalisé par Florian Reynaud, les élèves utilisent Webfinder pendant 50 minutes et aucun autre document n'est utilisé (pas de fiche élève par exemple)12. A aucun moment les élèves ne sont donc amenés à construire par eux mêmes les notions au travers d'une phase de structuration, phase qui pour nous est essentielle dans l'appropriation des connaissances. Dans cette optique, il pourrait être intéressant, avec plus de temps, de faire construire la base de données (ou une partie de celle-ci) par les élèves afin de s'assurer de leur compréhension de cette notion importante. Enfin, il faudrait aussi veiller à ce que les élèves parviennent bien à l'abstraction et n'en restent pas à l'exemple particulier de la simulation Webfinder.

Toutes ces remarques étant faites, nous restons tout à fait convaincus que Webfinder et la proposition pédagogique qui en découle vont inspirer des collègues professeur.e.s documentalistes qui sauront se réapproprier l'outil et construire des séances d'enseignement-apprentissage info-documentaire autour de la notion algorithme. Le travail amorcé par Florian Reynaud montre la voie vers l'enseignement de cette notion qui, selon nous, est une véritable notion info-documentaire13.

Conclusion

L'outil de simulation Webfinder est un outil pédagogique particulièrement intéressant pour les professeur.e.s documentalistes. Original, créé par un professeur documentaliste pour des professeur.e.s documentalistes, adapté aux élèves, Webfinder permet de prolonger et d'enrichir des pistes dans l'enseignement de l'information-documentation, notamment autour des notions moteur de recherche, base de données et algorithme de classement. Nous souhaitons une nouvelle fois saluer le travail colossal effectué par Florian Reynaud, concepteur de l'outil. Ce dernier compte d'ailleurs continuer à enrichir Webfinder et a émis à ce sujet des propositions d'amélioration qui ont l'air tout à fait intéressantes. Il projette ainsi de développer trois versions de la simulation (niveaux débutant, intermédiaire et avancé) et de présenter une ou plusieurs pages non indexées dans les niveaux intermédiaire et avancé.

Nous souhaitons aussi préciser que Florian Reynaud a développé un autre outil de simulation assez similaire: Weblink. Cet outil de simulation de média social permet de comprendre le fonctionnement d'une base de données14. Il a été testé dans le cadre d'une séquence sur les traces numériques menée avec des élèves de troisième15. En ce qui nous concerne, nous n'avons pas testé cette simulation puisque, pour des questions de droits, il n'existe pas de version publique du site. La simulation doit être hébergée par l'établissement et son installation doit faire l'objet d'une déclaration à la CNIL. Cependant, au vu du travail de grande qualité fourni lors de la conception de Webfinder, nous supposons qu'il en va de même pour Weblink.


  1. CORDIER, Anne. Grandir connectés : les adolescents et la recherche d'information. Caen : C&F éditions, 2015. 303 p. 

  2. CORDIER Anne. Imaginaires, représentations, pratiques formelles et non formelles de la recherche d’information sur Internet : le cas d’élèves de 6ème et de professeurs documentalistes. Thèse de doctorat en Sciences de l’Information et de la Communication. Lille : Université Charles De Gaulle – Lille III, 2011. 

  3. AILLERIE, Karine. Pratiques informationnelles informelles des adolescents (14-18 ans) sur le Web. Thèse de doctorat en Sciences de la Communication et de l'Information. Paris : Université Paris 13 – Paris Nord, 2011. 

  4. ROUSSEAU, Julien. Le moteur de recherche et les collégiens : quelles représentations, quels obstacles, quelle didactisation ?. Mémoire de Master MEEF Documentation, 2015. 

  5. ROUSSEAU, Julien. Le moteur de recherche et les collégiens : quelles représentations, quels obstacles, quelle didactisation ?. Les Trois couronnes, septembre 2015. 

  6. DUPLESSIS, Pascal. L'information-documentation en dix tableaux : ce qui est réellement enseigné par les professeurs documentalistes. Les Trois couronnes, novembre 2016. 

  7. Voir par exemple le site ID Base qui recense et analyse des fiches pédagogiques publiées par des professeurs documentalistes(http://idbase.esmeree.fr/) ou encore la sitographie présentée pages 274-275 de notre mémoire précédemment cité. 

  8. Voir la liste complète des modifications apportées à chaque version sur le site prof'' doc'(https://profdoc.iddocs.fr/spip.php?article56). 

  9. Toutes les caractéristiques techniques sont détaillées dans l'article de Florian Reynaud(https://profdoc.iddocs.fr/spip.php?article56). 

  10. Les différents documents utilisés pendant les séances sont disponibles sur le site de Florian Reynaud, y compris l'évaluation sommative. De plus, un bilan de l'activité, des remarques sur les dysfonctionnements et des conseils aux utilisateurs futurs du scénario sont rédigés. 

  11. Il semble y avoir par exemple une incohérence dans la conversion des nombres de liens pointant vers la page en "score pour les liens" : une page dont sept liens pointent vers elle obtient un score de quatre points alors qu'une page avec huit liens obtient un score inférieur, à savoir deux points, et qu'une page avec dix liens obtient également un score inférieur, à savoir trois points. 

  12. REYNAUD, Florian. 5ème : du document au média. prof' doc', mis à jour le 15 février 2016. 

  13. ROUSSEAU, Julien. L'algorithme : une notion info-documentaire à didactiser ?. Les Trois couronnes, 30 novembre 2015. 

  14. REYNAUD, Florian. Comprendre les médias sociaux avec une simulation. prof' doc', mis à jour le 18 février 2017. 

  15. REYNAUD, Florian. 3ème : les traces numériques. prof' doc', mis à jour le 04 juin 2016.